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La Belgique a-t-elle des États fédéraux ?

Herwig Lerouge

—11 juillet 2022

En Belgique, l’opinion publique n’est guère favorable à une scission, de sorte que les séparatistes y procèdent étape par étape et de manière sournoise. Un extrait de Debatfiches van de Vlaamse elite.

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Dans sa Déclaration de septembre 2021, le ministre-président flamand Jan Jambon a annoncé un prêt ou une garantie de la Flandre pour les victimes des inondations en Wallonie. Jusqu’à présent, il n’a toutefois pas dit comment cela fonctionnerait dans la pratique. Mais il a certes déclaré qu’il s’agissait d’une « question de solidarité avec nos voisins du sud ».

En Allemagne, en revanche, le gouvernement fédéral a débloqué un fonds de solidarité nationale de 30 milliards d’euros, dont la moitié sera cofinancée par les Länder non touchés. L’argument : il s’agit d’une catastrophe d’une ampleur à laquelle aucune région touchée ne peut faire face seule. Dans notre pays, le gouvernement fédéral n’accorde qu’un prêt de 1,2 milliard d’euros, qui doit être remboursé avec des intérêts. Apparemment, la répartition des compétences ne permet pas de créer un fonds de secours pour une région dans une situation d’urgence, car le Fonds des calamités et la gestion des catastrophes ont été régionalisés lors de la réforme de l’État de 2014. Voilà jusqu’où est allée la folie de la scission.

Mais dans cet article, je veux aborder l’utilisation de l’expression « voisins du sud ». Je me souviens encore de la leçon de géographie que nous avait donnée maître Brys à l’école primaire, dans la Flandre profonde, à Ooigem : nos voisins du sud, c’étaient les Français. Bien sûr, beaucoup de choses ont changé depuis lors. Pourtant, j’ai encore lu récemment dans le journal De Morgen : « Demain, les Diables rouges affronteront la France dans la première demi-finale de la Coupe du monde. Quel regard portent nos voisins du sud sur ce match ? » On est évidemment toujours le voisin du sud de quelqu’un, mais je n’ai jamais lu que la province néerlandaise du Brabant serait le « voisin du sud » de la province de Hollande-Méridionale. L’encyclopédie néerlandaise Oosthoek définit l’expression « voisin du sud » comme suit : « habitant d’un pays voisin situé au sud » ; et elle donne l’exemple de « Belge » pour les Néerlandais. Pour le dictionnaire Van Dale, le voisin du sud des Pays-Bas est : « la Belgique, un Belge ou les Belges ». Pas le Flamand.

Herwig Lerouge est l’ancien rédacteur en chef de la revue Études marxistes. Il est spécialiste de l’histoire du nazisme et de l’extrême droite en Flandre.

Le site linguistique du service flamand de radiodiffusion, VRTtaal.net, estime également que nos voisins du sud sont bel et bien les Français : « Le mot anglais “hashtag” est désormais repris par les dictionnaires français. L’an dernier, l’Académie française décidait toujours qu’il fallait utiliser le purisme “mot-dièse” au lieu de “hashtag”. Le mot “selfie” intègre aussi la sélection de nos voisins du sud. » Il s’agit donc d’un autre pays.

Mais notre ministre-président a évidemment consulté les « bons » dictionnaires. Prenez par exemple « Het Vlaams Woordenboek ». Il se présente comme un « site web où l’on peut trouver des descriptions de mots, de termes et expressions flamands ». Ces mots sont bien établis en Flandre, mais ne sont pas acceptés comme « langue standard » du néerlandais. Il y figure un « voisin du sud » : « La France, un Français (sic), les Français, ou bien la Wallonie, les Wallons ». Le site ruraalnetwerk.be du gouvernement flamand utilise également cette expression de cette manière. Dans une newsletter de 2013, on peut lire : « notre voisin du sud, la Wallonie ».

La Wallonie, un autre pays ?

Ce glissement de sens peut peut-être sembler innocent. Beaucoup de gens adoptent cette nouvelle acception sans y réfléchir. Mais il y a plus derrière cela. Le fait que les Wallons soient devenus nos « voisins du sud » a tout à voir avec la création du concept de « l’État fédéré flamand ». Toutefois, sur le plan constitutionnel, il n’y a pas d’« États fédérés » en Belgique. Le premier article de la Constitution stipule : « La Belgique est un État fédéral qui se compose des communautés et des régions. » Les articles 2 à 4 précisent : « La Belgique comprend trois communautés : la Communauté flamande, la Communauté française et la Communauté germanophone. La Belgique comprend trois régions : la Région wallonne, la Région flamande et la Région bruxelloise. » Plus loin : « La Constitution et les autres lois relatives aux droits politiques déterminent quelles sont, outre la qualité de Belge, les conditions nécessaires pour l’exercice de ces droits. » On peut donc devenir Belge, pas Flamand.

Même dans les descriptions officielles du site web du gouvernement flamand, le mot « État fédéré » n’apparaît pas : « La Région flamande s’étend sur le territoire des cinq provinces flamandes : Anvers, Limbourg, Flandre-Orientale, Brabant flamand et Flandre-Occidentale. La Communauté flamande comprend tous les habitants de la Flandre et les habitants flamands de la région bilingue de Bruxelles-Capitale. » Sur cette page, on trouve également les « compétences de la Région flamande et de la Communauté flamande ». Les noms « Flandre » et « Wallonie » ne figurent ni dans la Constitution ni dans les lois spéciales. Pourtant, le mot « deelstaat » (État fédéré) s’est progressivement banalisé.
C’est ce qu’on peut lire sur le site du Parlement flamand : « La Constitution (stipule) que la Belgique est un État fédéral, avec des États fédérés (régions et communautés). » C’est donc inexact, mais c’est pourtant bien ce qui y figure. Bien sûr, Jambon utilise lui aussi ce mot chaque fois que c’est possible.

Sur le plan constitutionnel, il n’y a pas d’« États fédérés » en Belgique. Mais beaucoup de gens adoptent cette nouvelle acception sans y réfléchir.

Lors d’une conversation avec le patron du cyclisme Lefevere au sujet du Tour des Flandres sans public à cause du coronavirus en 2020, il se souvient : « Quand j’avais vingt ans, je distribuais des drapeaux avec le lion flamand sur le parcours du Tour. Et, non, ce n’est pas de la récupération. Pourquoi faut-il donner à cela une mauvaise connotation ? C’est le drapeau officiel, le symbole officiel de l’État fédéré de Flandre. » Et Bart De Wever a formulé son opinion sur la solution de la crise politique comme suit en mars 2020 : « La Wallonie a un gouvernement que la Wallonie trouve bon, la Flandre a un gouvernement que nous, nous trouvons bon. Si le Palais m’appelle pour me demander mon avis, je dirai : « Sire, voyez les “deelstaten” (“États fédérés”, NdlT) ». Même le site web du Service public fédéral Emploi, Travail et Concertation sociale a entre-temps adopté le concept non légal : « Le service fédéral est compétent pour infliger des amendes administratives dans les matières qui ressortent de la compétence de l’autorité fédérale et les entités fédérées (en néerlandais : deelstaten, NdlT) sont compétentes pour infliger des amendes administratives dans les matières qui ressortent de leurs compétences. »

Mais, si l’on présente les choses de cette manière, nous avons déjà au moins trois « États fédérés » sur cette compétence, car la Région de Bruxelles-Capitale est également compétente en matière d’emploi.

Flanders, state of the art?

Il est vrai que le terme « État fédéré » est plus convivial que « région » ou « communauté ». En effet, il faut être un expert constitutionnel pour savoir quelle autorité compétente utilise le terme « région » ou « communauté ». En français, il existe une expression qui peut être utilisée à la fois pour « région » et « communauté » : « entité fédérée ». Le mot « staat » ou « État » n’y figure pas. Mais les séparatistes belges veulent absolument imposer le mot « staat » (État) dans le terme « deelstaat » (« État fédéré » et non « entité fédérée », NdlT). De cette manière, ils anticipent leur objectif final, un État flamand indépendant, et veulent surtout donner l’impression que cet État est déjà une réalité. Il faut juste un dernier coup de pouce. Le gouvernement flamand dirigé par Geert Bourgeois (N-VA) a d’ailleurs choisi comme slogan en anglais : « Flanders. State of the Art. » De la sorte, on peut non seulement essayer de récupérer le talent artistique individuel d’une certaine région pour une formation identitaire nationaliste, mais aussi prétendre que la Flandre est déjà un État.

Malgré tout leur argent et leur énergie, les séparatistes ne parviennent pas à gagner les cœurs et les esprits pour une scission du pays.

Ces manœuvres sont nécessaires, car les séparatistes ont un problème. Malgré tout leur argent et leur énergie, ils ne parviennent pas à gagner les cœurs et les esprits pour une scission du pays. Jan Jambon (N-VA) a ouvertement admis dans sa conférence d’ouverture à l’Université de Gand en 2019 qu’il n’y a pas de large base pour soutenir l’idée d’une Flandre indépendante. C’est pourquoi la N-VA a inventé le « confédéralisme ». Une majorité veut davantage de Belgique. Et seule une petite minorité des habitants de la Région flamande souhaite une scission du pays, comme l’a montré « De Stemming » du journal De Standaard en mai 2021. Dans des régions comme l’Écosse et la Catalogne, où les partis nationalistes sont aussi puissants qu’ici, près de la moitié de la population marche derrière un drapeau indépendantiste.

Ce n’est pas que l’on n’ait pas essayé de bannir autant que possible la « Belgique » de la vie politique, culturelle et même sportive pour la remplacer par la « Flandre ». La Belgique francophone a
toujours sa RTBF. Depuis tout un temps, le gouvernement flamand remplace les émissions en néerlandais de la Radio et Télévision belge (BRTN) par la Radio et Télévision flamande. En Allemagne fédérale, il y a deux stations nationales avec le D de Deutschland (Allemagne) dans leur nom, outre toute une série de stations régionales. Dans notre pays, presque tous les partis politiques ont également été divisés. En Allemagne fédérale, en revanche, il y a le SPD, la CDU, le FDP : des partis politiques avec le « D » dans leur nom, qui se présentent à l’électeur sur tout le territoire. En Flandre, on a transformé la BLOSO (Agentschap voor de Bevordering van de Lichamelijke Ontwikkeling, de Sport en de Openluchtrecreatie, c’est-à-dire Agence pour la promotion du développement physique, des sports et des loisirs de plein air) en « Sport Flanders » et scindé presque toutes les fédérations sportives. De Badminton Vlaanderen à Boogsport Vlaanderen (Tir à l’arc Flandre) jusqu’à, oui… Sneeuwsport Vlaanderen (Sports de neige Flandre).

Par ailleurs, les séparatistes distribuent des milliers de drapeaux de lion gratuits lors d’événements sportifs. « À partir du 19 septembre, on y sera : Flanders 2021, les championnats du monde de cyclisme en Flandre. » Même lorsque nous voyons des images de la Coupe du monde de cyclisme, elles sont colorées de drapeaux flamands. C’est le Vlaamse Volksbeweging (VVB, Mouvement populaire flamand, association nationaliste flamande, NdlT) qui réalise cela en plaçant des drapeaux, souligne Steven Vergauwen, collaborateur du VVB :

« Le VVB mène des campagnes de signalement depuis plus de 20 ans, tant dans le cyclisme sur route que dans le cyclocross. De cette manière, le VVB assure le marketing mondial de la Flandre. Nous voulons montrer la Flandre au monde entier. Nous remettons la Flandre à la place qui lui revient. Nous mettons notre symbole national au premier plan de l’image. La frénésie pour les Diables rouges – même s’ils n’ont pas gagné – s’est exprimée par de nombreux drapeaux tricolores pendant le championnat d’Europe de football. Nous rétablissons un équilibre. »

Vlaanderen.vla

Un certain nombre de tentatives visant à présenter la Région flamande comme un nouvel État se sont toutefois soldées par un flop grotesque. Par exemple, en 2006, lorsque la N-VA, par l’intermédiaire de Mark Demesmaeker, a tenu à ce que le gouvernement flamand change le nom de domaine de ses adresses Internet de .be à .eu. Mais apparemment, ce n’était pas encore assez antibelge.

En octobre 2008, le Eindhovens Dagblad rapportait que « l’entité fédérée belge Flandre va demander son propre nom de domaine pour internet. La Flandre veut prendre ses distances avec le .be belge en utilisant, par exemple, l’extension .vla. Le ministre-président flamand Kris Peeters a annoncé cette demande au Parlement flamand, à la suite d’une question du parti nationaliste flamand N-VA, l’un des partis qui rêvent d’une république indépendante de Flandre ».

Le gouvernement flamand a même fait appel à une agence spécialisée qui a soumis cette demande mi-2009, pour la somme de 100 000 euros. Et, selon le magazine Datanews, une nouvelle tentative aurait été faite en 2011 : « Pourquoi avoir une extension propre ? Pour promouvoir la Flandre en tant qu’entité distincte, loin de l’entité nationale qu’est la Belgique, caractérisée par le .be toujours utilisé sur la plupart des sites flamands actuellement. » L’extension de domaine est au 21e siècle ce qu’était le drapeau au 20e.

D’autres projets de prestige, tels que la tristement célèbre Flanders House à New York (avec un loyer d’un demi-million d’euros par an et un premier directeur licencié au bout d’à peine quelques mois en raison de sa soif de profit), étaient également autant de tentatives de gommer la Belgique et de se profiler comme un État à part entière.

Un combat perdu d’avance

Il y a aussi le « canon flamand », censé illustrer la grandeur du passé de la Flandre, ou encore le nouveau « Musée de l’histoire et de la culture flamandes », destiné à préparer les Flamands au programme d’État envisagé par la N-VA et le Vlaams Belang. Les nationalistes flamands s’appuient sur l’art, la culture et l’enseignement pour forger une identité flamande. Des historiens de toutes les universités flamandes ont tiré la sonnette d’alarme dans une carte blanche : « L'”État” flamand contemporain et la manière dont il est né (le point de départ du Canon flamand à élaborer) ne sont qu’une perspective qui en exclut, par définition, d’autres. Le fait que le ministre de l’Enseignement lance le Canon de la Flandre laisse penser qu’il remplacera, à terme, les examens finaux. L’accord de gouvernement flamand ne laisse aucun doute à ce sujet. Le canon sera utilisé à la fois dans l’enseignement et dans le cadre de programmes d’intégration civique “de soutien”. »

Les nationalistes flamands s’appuient sur l’art, la culture et l’enseignement pour forger une identité flamande. Mais des historiens de toutes les universités flamandes ont tiré la sonnette d’alarme.

Si, en 2020, un gouvernement flamand dirigé par des nationalistes flamands s’engage en faveur d’un canon flamand, il sait très bien pourquoi. Après tout, la nation doit être imaginée avant de pouvoir exister. C’est pour cela que le gouvernement flamand demande à la société de radiodiffusion publique et aux fonds pour le cinéma et la littérature de renforcer l’identité flamande, tandis que les médias d’information flamands mettent littéralement et symboliquement la Flandre sur la carte.

Mais ce combat contre la Belgique semble perdu d’avance. En 2010, Jan Peumans, alors président du Parlement flamand, se voyait forcé de conclure que les Flamands avaient encore trop peu conscience de leur propre identité flamande. Il attendait de l’« État fédéré flamand » qu’il comble ce manque d’identité et soutienne une « identité flamande qui devrait aboutir à la construction de la nation ». Dix ans plus tard, dans son Livre blanc pour la formation de l’État flamand, le VVB, qui n’est pourtant pas la branche la plus extrême de la Flandre nationaliste, soupire de même :

« Nous devons être réalistes : pour le moment, le soutien à une Flandre indépendante est très faible. La Flandre est donc fort peu présente dans la vie quotidienne. Les associations nationalistes flamandes ne savent pas vraiment comment s’adresser à un public plus large, et le gouvernement flamand fait tranquillement son travail et se contente depuis longtemps d’un excédent budgétaire et de quelques belles missions à l’étranger. Il est donc urgent de changer cela. »

Outre les directives qu’il donne à la société civile, le mouvement séparatiste s’adresse aussi aux partis et au gouvernement :

« Le gouvernement flamand travaille encore trop dans l’ombre du gouvernement fédéral. Le centre de gravité du pouvoir se situe toujours à ce niveau fédéral, alors qu’il devrait plutôt se situer au niveau des entités fédérées. Le gouvernement flamand doit avant tout être seul à avoir son mot à dire en ce qui concerne son entité et son territoire. Toute interférence du niveau fédéral (ou autre) doit être remise en question. La Flandre doit se comporter comme l’État souverain qu’elle aspire à être. »

Cela « implique également de réfléchir à un fondement juridique : une constitution flamande. Il y a eu par le passé des tentatives en ce sens ». Cela peut aussi se faire « en utilisant au maximum chaque compétence acquise et, une fois qu’elle a atteint sa limite, en la remettant en cause et en l’élargissant ». En nommant un ministre de la Justice flamand, l’équipe de Jan Jambon s’y emploie et questionne les limites de ses pouvoirs. La justice est en effet l’une des missions essentielles d’un État.

Une constitution pour l’État fédéré flamand

Sans constitution, il n’y a pas d’État. En 2016, le ministre-président de l’époque, Geert Bourgeois, a tenté de prendre cette question en main : « La Flandre doit bénéficier d’une autonomie constitutionnelle complète », a-t-il déclaré, certes en son nom propre, puisque l’accord de gouvernement flamand ne dit rien à ce sujet. « Dans presque tous les autres États fédéraux, les États fédérés ont leur propre constitution », justifie-t-il. Le CD&V lui emboîte le pas, désireux de voir la « Charte flamande » (déposée au Parlement flamand en 2012 sous le gouvernement Peeters) approuvée en tant que résolution. « On peut déjà avancer vers une constitution flamande, même sans révision constitutionnelle », a déclaré Hilde Crevits.

L’autonomie constituante est le pouvoir autonome des États fédérés de créer leur propre constitution indépendamment du législateur fédéral. Or la Belgique ne dispose pas d’une telle autonomie constitutionnelle. Dans une proposition de déclaration de révision de la Constitution, déposée par Luc Van den Brande au Sénat belge le 4 avril 2007, l’ex-ministre-président écrit : « L’autonomie dite “constitutive”, dans sa forme actuelle, laisse très peu de place à l’action autonome des entités fédérées pour déterminer leur propre structure. Cette conception minimaliste de l’autonomie constitutive empêche les entités fédérées actuelles de rédiger leur propre constitution. Une telle constitution est toutefois une caractéristique des États fédéraux. Les États fédérés doivent disposer de cette possibilité dans un modèle où ils doivent pouvoir établir leur caractère étatique propre dans une loi fondamentale. » Les régions, quant à elles, ont entre-temps obtenu une autonomie institutionnelle partielle. Elles peuvent contrôler partiellement le fonctionnement de leurs propres institutions.
Mais le premier sens du mot « constitution » est celui de la constitution en tant qu’acte fondateur d’un État ; l’expression de la volonté d’un peuple ou d’une nation souveraine de se manifester en tant qu’entité politique indépendante (autodétermination) et de s’organiser en tant qu’État à cette fin (autonomie constitutionnelle).

Les constitutions sont généralement rédigées au cours de la phase de fondation d’un État. Mais une simple Charte donne tout de même l’impression que la Flandre est un État en devenir. C’est également ainsi que le VVB voit les choses : « Avec un plan aussi concret, il devient clair pour tout le monde qu’il ne s’agit plus seulement de déclarations et de projets, mais qu’un véritable travail de formation d’un État est en cours. (…) C’est pourquoi il faut aussi prévoir un projet pour la Flandre de demain, qui définisse ses priorités en matière sociale, économique, écologique ou autres. Ce projet doit donner une image claire de la nouvelle nation dans laquelle nous vivrons. (…) Le projet d’une Flandre future et souveraine implique également de réfléchir à une base juridique solide, à savoir une constitution flamande. La Charte pour la Flandre, proposée par le gouvernement flamand en 2012, en est la plus proche version. Il est grand temps de la ressortir des cartons, de la mettre à jour et de l’adopter. » La Charte, une constitution pour l’État fédéré, pour ainsi dire, afin que la Flandre ait enfin vraiment de nouveaux « voisins du Sud ».

Cet article a été publié à l’origine comme chapitre du livre Debatfiches van de Vlaamse Elite (ed. Robrecht Vanderbeeken et Karim Zahidi, EPO Publishers, 2022).