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Dix thèses sur le marxisme et la décolonisation

Vijay Prashad

—15 décembre 2022

Ces dernières années, les intellectuels cubains se sont plongés dans le débat sur la décolonisation et la culture. Vijay Prashad évoque le thème du marxisme et de la décolonisation en dix thèses.

Depuis 1959, le processus révolutionnaire cubain a établi, au prix de lourds sacrifices, la souveraineté politique de l’île et lutté contre des siècles de pauvreté pour asseoir sa souveraineté économique. À compter de 1959, sous la direction des forces révolutionnaires, Cuba a tenté de générer un processus culturel permettant aux onze millions d’habitants de l’île de rompre avec l’étranglement culturel hérité de l’impérialisme espagnol et étasunien. Soixante ans plus tard, Cuba est-elle en mesure de se dire souveraine sur le plan culturel ? Le bilan suggère une réponse complexe puisque la production culturelle et intellectuelle étasunienne continue d’assaillir l’île avec la force et la régularité des ouragans d’été annuels.

Pour tenter d’y voir plus clair, la Casa de las Américas1 a organisé une série de rencontres sur la question de la décolonisation, auxquelles j’ai participé. J’y ai évoqué le thème du marxisme et de la décolonisation comme suit.

Première thèse : la fin de l’histoire

L’effondrement de l’URSS et du système d’État communiste en Europe de l’Est en 1991 s’est produit parallèlement à une grave crise de la dette dans les pays du Sud, qui a commencé avec le défaut de paiement du Mexique en 1982. Ces deux événements — la disparition de l’URSS et l’affaiblissement du projet tiers-mondiste — se sont heurtés, dans les années 1990, à l’assaut de l’impérialisme étasunien et à un projet de mondialisation guidé par les ÉtatsUnis. Pour la gauche, cette décennie a été placée sous le signe de la faiblesse, dans la mesure où nos propres traditions et organisations de gauche se sont mises à douter d’elles-mêmes et n’ont pas été en mesure de faire valoir les apports de la théorie marxiste dans le monde. Les idéologues de l’impérialisme US clamaient la fin de l’histoire, la seule possibilité étant, selon eux, l’avancement du projet américain. La capitulation du dernier gouvernement soviétique a infligé une lourde sanction à la gauche et a conduit non seulement à la dissolution de nombreux partis de gauche, mais aussi à l’affaiblissement de la confiance de millions de personnes dans les thèses de la pensée marxiste.

Deuxième thèse : la bataille des idées

Dans les années 1990, le président cubain Fidel Castro a appelé ses compatriotes à s’engager dans une « bataille des idées », une expression empruntée à L’Idéologie allemande (1846) de Karl Marx et Friedrich Engels2.

Fidel Castro voulait dire par là que les gens de gauche ne doivent pas trembler face à l’essor de l’idéologie néolibérale. Au contraire, ils doivent mettre en avant, avec aplomb, l’incapacité du néolibéralisme à résoudre les dilemmes fondamentaux de l’humanité. Ainsi, le néolibéralisme n’a aucune réponse à la persistance de la faim dans le monde : 7,9 milliards d’individus vivent sur une planète où il y a assez de nourriture pour 15 milliards de personnes ; or environ 3 milliards d’êtres humains peinent à manger à leur faim. Ce problème ne peut être résolu que par le socialisme et non par l’industrie de la charité3. La « bataille des idées » fait référence à la lutte qui vise à empêcher que les grands défis de notre époque — et les solutions proposées pour les résoudre — soient définis par la bourgeoisie.

La « bataille des idées » fait référence à la lutte qui vise à empêcher que les grands défis de notre époque soient définis par la bourgeoisie.

Au contraire, les forces politiques au service du socialisme doivent s’efforcer de proposer un état des lieux et des solutions beaucoup plus réalistes et crédibles. Ainsi, en 1979, Fidel Castro a prononcé devant les Nations unies un discours particulièrement émouvant sur les notions de « droits humains » et d’« humanité » :

Il est souvent question des droits de la personne, mais il est également nécessaire de parler des droits de l’humanité. Pourquoi certains doivent-ils marcher pieds nus pour que d’autres roulent dans des voitures de luxe ? Pourquoi certains ne doivent-ils vivre que 35 ans pour que d’autres puissent vivre jusqu’à 70 ans ? Pourquoi certains doivent-ils être extrêmement pauvres pour que d’autres deviennent exagérément riches ? Je parle au nom des enfants qui, dans le monde, n’ont même pas un morceau de pain. Je parle au nom des malades qui ne disposent pas de médicaments. Je parle au nom de ceux auxquels on a refusé le droit à la vie et à la dignité humaine4.

Lorsque Fidel Castro est revenu à la bataille des idées dans les années 1990, la gauche se trouvait confrontée à deux tendances connexes qui continuent de poser des problèmes idéologiques à l’époque actuelle :

A. Le post-marxisme

On a vu surgir l’idée selon laquelle le marxisme était trop concentré sur les « grands récits » (tels que l’importance de transcender le capitalisme pour passer au socialisme) et que les récits fragmentaires seraient plus précis pour comprendre le monde. Les luttes de la classe travailleuse et de la paysannerie pour accéder au pouvoir au sein de la société et sur les institutions de l’État ont été considérées comme un énième faux « grand récit », tandis que les politiques fragmentées des organisations non gouvernementales ont été jugées plus réalisables.

Vous ne pouvez pas décoloniser votre esprit si vous ne décolonisez pas également les conditions de production sociale qui renforcent la mentalité coloniale.

Le repli du pouvoir vers la prestation de services et vers une politique de réforme s’est fait au nom du dépassement de Marx. Cet appel à dépasser Marx était en réalité, comme l’a souligné le regretté Aijaz Ahmad, un argument pour revenir à la période antérieure à Marx, pour négliger les apports du matérialisme historique et la possibilité de construire le socialisme en tant que négation historique de la brutalité et de la décadence capitalistes. Le post-marxisme marquait un retour à l’idéalisme et au perfectionnisme.

B. Le post-colonialisme

Certaines branches de la gauche se sont mises à soutenir que l’impact du colonialisme était tel qu’aucune transformation n’était plus possible et que la seule réponse possible était un retour au passé. Elles traitaient le passé, à l’instar de la thèse avancée par le marxiste José Carlos Mariátegui en 1928 à propos de la notion d’indigénisme, comme une fin et non comme un moyen. Plusieurs courants de la théorie post-coloniale se sont développés, certains d’entre eux offrant de véritables perspectives souvent inspirées des meilleurs textes des intellectuels patriotes des nouvelles nations post-coloniales et de la tradition révolutionnaire de libération nationale (ancrée par des écrivains tels que Frantz Fanon).

À partir des années 1990, la tradition post-coloniale, qui s’était auparavant engagée en faveur d’un changement révolutionnaire dans le tiersmonde, se voyait désormais balayée par les courants universitaires de l’Atlantique Nord qui favorisaient l’impossibilité révolutionnaire. L’une des variantes de cette nouvelle tradition, l’afro-pessimisme, suggérait, dans sa version la plus extrême, un paysage désolé de « mort sociale » pour les personnes d’origine africaine, sans possibilité de changement. La pensée décoloniale (decolonialidad) est restée enfermée dans la pensée européenne, en acceptant l’affirmation selon laquelle de nombreux concepts — tels que la démocratie — sont définis par la « matrice du pouvoir » ou la « matrice de la modernité » coloniales. Les textes de la pensée décoloniale revenaient inlassablement à la pensée européenne, sans parvenir à produire une tradition enracinée dans les luttes anti-coloniales de notre époque. Dans ces variantes du post-colonialisme, la nécessité du changement a été suspendue.

La seule véritable décolonisation est l’anti-impérialisme et l’anti-capitalisme.

Vous ne pouvez pas décoloniser votre esprit si vous ne décolonisez pas également les conditions de production sociale qui renforcent la mentalité coloniale. Le post-marxisme ne tient pas compte du fait de la production sociale, ni de la nécessité de construire une richesse sociale qui doit être socialisée. L’afro-pessimisme suggère qu’il est impossible d’accomplir une telle tâche à cause du racisme permanent. La pensée décoloniale va au-delà de l’afro-pessimisme. En revanche, ne voyant pas la nécessité de décoloniser les conditions de production sociale, elle n’est pas en mesure de dépasser le post-marxisme.

Troisième thèse : une panne d’imagination

Entre 1991 et le début des années 2000, la tradition du marxisme de libération nationale semblait écrasée, incapable de répondre aux doutes semés par le post-marxisme et la théorie post-coloniale. Ces traditions du marxisme étaient désormais dépourvues du type de soutien institutionnel dont elles bénéficiaient auparavant, lorsque les mouvements révolutionnaires et les gouvernements du tiers-monde s’entraidaient et où même les institutions de l’ONU travaillaient pour faire avancer certaines de ces idées. Les platesformes qui ont vu le jour et avaient vocation à faire germer des formes d’internationalisme de gauche — telles que le Forum social mondial — semblaient peu enclines à faire preuve de clarté quant aux ambitions des mouvements populaires. Ainsi, la devise adoptée par le Forum social mondial, « un autre monde est possible », semble bien faible, puisque cet autre monde pourrait tout aussi bien être défini par le fascisme. Il se dégageait peu d’intérêt pour un slogan clair, tel que « le socialisme est nécessaire ».

L’un des grands maux de la pensée post-marxiste — qui a tiré une grande partie de ses arguments de certaines formes d’anarchisme — a été l’anxiété puriste à l’égard du pouvoir de l’État. Au lieu de mettre en avant les limites du pouvoir de l’État pour plaider en faveur d’une meilleure gestion de l’État, la pensée post-marxiste s’est opposée à toute tentative de s’assurer un pouvoir sur l’État. Il s’agit d’un argument fondé sur le privilège de ceux qui n’ont pas à souffrir des faits persistants de la faim et de l’analphabétisme, qui prétendent que les formes d’aide mutuelle ou de charité à petite échelle ne sont pas « autoritaires » comme les programmes d’éradication de la faim mis en œuvre par l’État. Un tel argument de pureté finit par écarter toute possibilité d’abolir les faits persistants de la faim et d’autres atteintes à la dignité et au bien-être humains. Dans les pays pauvres, où les initiatives de charité et d’entraide à petite échelle ont un impact négligeable face aux défis énormes auxquels la société est confrontée, rien de moins ne se justifie que la prise du pouvoir de l’État et l’utilisation de ce pouvoir pour éradiquer fondamentalement les faits persistants de l’inégalité et de la misère.

Le capitalisme a déjà échoué. Il n’est pas en mesure de s’attaquer aux questions fondamentales de notre époque.

Aborder la question du socialisme implique une réflexion approfondie sur les forces politiques à mobiliser pour contester à la bourgeoisie l’hégémonie idéologique et le contrôle de l’État. Ces forces ont subi un revers crucial lorsque la mondialisation néolibérale a, dès les années 1970, réorganisé la production le long d’une chaîne de production mondiale, fragmentant la production industrielle à travers le monde. Cela a eu pour conséquence d’affaiblir les syndicats dans les secteurs les plus importants et les plus denses et d’invalider la nationalisation en tant que stratégie possible de construction du pouvoir prolétarien. Désorganisée, amputée de ses syndicats, avec en prime de longs déplacements et de longues journées de travail, la classe travailleuse internationale dans son ensemble s’est retrouvée en situation de précarité5.

L’Organisation internationale du travail désigne ce secteur sous le terme de « précariat », c’est-à-dire le prolétariat précaire. Les forces désorganisées de la classe travailleuse et de la paysannerie, des chômeurs et des sous-employés, se trouvent dans l’impossibilité de construire à travers leurs luttes le type de théorie et de confiance nécessaires pour affronter directement les forces du capital.

L’une des principales leçons pour les mouvements paysans et de la classe travailleuse provient des luttes en gestation en Inde. Au cours de la dernière décennie, les grèves générales ont mobilisé à hauteur de 300 millions de travailleurs par an. En 2020-2021, des millions d’agriculteurs ont fait grève pendant toute une année, obligeant le gouvernement à revenir sur ses nouvelles lois d’uberisation du travail agricole. Comment le mouvement paysan et le mouvement syndical ont-ils pu y parvenir dans un contexte marqué par un très faible taux de syndicalisation et par le fait que plus de 90 % des travailleurs appartiennent à l’économie informelle ?6 Grâce aux combats menés par les travailleurs informels — principalement des femmes dans le secteur des soins de santé — les syndicats ont, au cours des deux dernières décennies, commencé à prendre en compte les problèmes des travailleurs informels — là encore, principalement des femmes — comme des enjeux relevant de l’ensemble du mouvement syndical.

Les luttes pour la permanence de l’emploi, pour des contrats salariaux corrects, pour la dignité des travailleuses, etc. ont produit une forte unité entre toutes les différentes catégories de main-d’œuvre. Les principales luttes que nous avons vues en Inde sont menées par ces travailleurs informels, dont le militantisme est désormais canalisé par le pouvoir organisé des structures syndicales. Plus de la moitié de la main-d’œuvre mondiale est constituée de femmes — des femmes qui ne considèrent pas les problèmes qui les concernent comme des enjeux spécifiques aux femmes, mais comme des enjeux pour lesquels tous les travailleurs doivent lutter et gagner. Il en va de même pour les enjeux liés à la dignité des travailleurs en termes de race, de caste et d’autres distinctions sociales.

En outre, les syndicats se sont attaqués à des questions qui ont un impact sur la vie sociale et le bien-être de la communauté en dehors du lieu de travail, en défendant le droit à l’eau, aux raccordements aux égouts, à l’éducation des enfants et au droit d’être à l’abri de toute forme d’intolérance. Ces luttes « communautaires » font partie intégrante de la vie des travailleurs et des paysans ; en s’y engageant, les syndicats s’enracinent dans le projet de sauvegarde de la vie collective, en construisant le tissu social nécessaire à la marche vers le socialisme.

Quatrième thèse : le retour aux sources

Le moment est venu de renouer avec le meilleur de la tradition marxiste de libération nationale. Cette tradition trouve son origine dans le marxisme-léninisme, une tradition qui s’est depuis toujours élargie et approfondie grâce aux luttes de centaines de millions de travailleurs et de paysans dans les nations les plus pauvres. Les théories de ces luttes ont été élaborées par des figures telles que José Carlos Mariátegui, Hô Chi Minh, E. M. S. Namboodiripad, Claudia Jones et Fidel Castro. Cette tradition présente deux facettes fondamentales :

  • En partant des mots « libération nationale », nous arrivons au concept-clé de souveraineté. Le territoire d’une nation ou d’une région doit être souverain face à la domination impérialiste.

  • En partant de la tradition du marxisme, nous arrivons au concept clé de dignité. La lutte pour la dignité implique une lutte contre la dégradation du système salarial et contre les anciennes hiérarchies sociales héritées et liées à la pauvreté (dont celles fondées sur la race, le genre, l’orientation sexuelle, et autres).

Cinquième thèse : un marxisme « légèrement étiré »

Le marxisme a investi les luttes anticoloniales non pas à travers Marx directement, mais plus précisément par le biais des développements importants que Lénine et l’Internationale communiste ont apportés à la tradition marxiste. Lorsque Frantz Fanon a affirmé que le marxisme était « légèrement étiré » une fois sorti du contexte européen, c’est cet étirement qu’il avait en tête7. Cinq éléments clés définissent le caractère de ce marxisme « légèrement étiré » à travers un large éventail de forces politiques :

  • Il était clair pour les marxistes de la première heure que le libéralisme ne résoudrait pas les dilemmes de l’humanité, les faits persistants de la vie sous le capitalisme (tels que la faim et la mauvaise santé). Pas un seul projet d’État capitaliste n’a trouvé de solution à ces dilemmes au cœur de son action, la laissant plutôt à l’industrie de la charité. Les projets de l’État capitaliste ont poussé l’idée des « droits humains » jusqu’à l’abstraction ; les marxistes, quant à eux, ont reconnu que ce n’est que si ces dilemmes sont dépassés que les droits humains pourront être établis dans le monde.

  • La forme moderne de production industrielle est la condition préalable à ce dépassement, car elle seule est à même de générer une richesse sociale suffisante qui puisse être socialisée. Le colonialisme n’a pas permis le développement de forces productives dans le monde colonisé, rendant ainsi impossible la création d’une richesse sociale suffisante dans les colonies pour dépasser ces dilemmes.

  • Le projet socialiste dans les colonies devait lutter à la fois contre le colonialisme (pour la souveraineté, donc) et contre le capitalisme et ses hiérarchies sociales (pour la dignité, donc). Ce sont là les deux aspects essentiels du marxisme de libération nationale.

  • En raison de l’absence de développement du capitalisme industriel dans les colonies, et donc d’un nombre suffisant de travailleurs industriels (le prolétariat), la paysannerie et les travailleurs agricoles devaient constituer une partie essentielle du bloc historique du socialisme.

  • Il est important de noter que les révolutions socialistes ont eu lieu dans les régions les plus pauvres du monde — Russie, Vietnam, Chine, Cuba — et non dans les régions plus riches, où les forces productives étaient mieux développées. Les gouvernements révolutionnaires des nations les plus pauvres qui avaient gagné leur indépendance et mis en place des gouvernements de gauche se sont vus chargés de la double tâche de développer les forces productives et de socialiser les moyens de production.

La devise adoptée par le Forum social mondial, « un autre monde est possible », semble bien faible, puisque cet autre monde pourrait tout aussi bien être défini par le fascisme.

La mission historique des gouvernements de ces pays, formés et soutenus par l’action publique, était beaucoup plus complexe que celle envisagée par la première génération de marxistes. Un marxisme nouveau, sans bornes, a émergé de ces lieux, où une attitude expérimentale envers la construction socialiste a vu le jour. Cependant, nombre de ces développements dans la construction du socialisme n’ont pas été élaborés sous forme de théorie, ce qui signifie que la tradition théorique du marxisme de libération nationale n’était pas entièrement disponible pour contrer les attaques post-marxistes et post-coloniales contre la praxis socialiste dans le tiers-monde.

Sixième thèse : les dilemmes de l’humanité

Des rapports nous parviennent régulièrement sur la terrible situation à laquelle le monde se trouve confronté, qu’il s’agisse de la faim, de l’analphabétisme ou des conséquences de plus en plus fréquentes de la catastrophe climatique. La richesse sociale qui pourrait être consacrée à la résolution de ces profonds dilemmes de l’humanité est gaspillée dans les armes et les paradis fiscaux.

Alors que les 17 objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies visant à éliminer la faim et à promouvoir la paix nécessiteraient une injection de 4200 milliards USD par an, à l’heure actuelle, une fraction infinitésimale de cette somme est consacrée à la réalisation de ces objectifs8. Avec la pandémie et l’inflation galopante, encore moins d’argent ira aux ODD, tandis que les mesures de référence servant à évaluer le bien-être, la souveraineté et la dignité des êtres humains passeront de plus en plus inaperçues. La faim, le plus grand dilemme de l’humanité, n’est plus en passe d’être éradiquée (sauf en Chine, où la pauvreté absolue a pris fin en 2021)9. Selon les estimations, près de 3 milliards de personnes sont aujourd’hui confrontées quotidiennement à la faim sous diverses formes10.

Prenons, par exemple, le cas de la Zambie et du quatrième ODD visant à éradiquer l’analphabétisme. Dans la province de Copperbelt, environ 60 % des enfants de la première à la quatrième année sont illettrés11. C’est la région qui produit la majeure partie du cuivre mondial, une matière première essentielle pour produire nos appareils électroniques.

C’est grâce aux parents de ces enfants que le cuivre arrive sur le marché mondial, mais leurs enfants ne savent pas lire. Ni le post-marxisme ni le post-colonialisme n’abordent le phénomène de l’analphabétisme et de la détermination de ces parents à voir leurs enfants alphabétisés.

La théorie du marxisme de libération nationale, ancrée dans la souveraineté et la dignité, elle, aborde ces questions : elle exige que la Zambie ait le contrôle sur la production du cuivre et touche des taxes plus élevées (souveraineté) et demande aussi que la classe travailleuse zambienne perçoive une plus grande part de la plus-value (dignité). Une plus grande souveraineté et une plus grande dignité sont les voies qui permettent de faire face aux dilemmes auxquels l’humanité est confrontée. Mais plutôt que de consacrer la richesse sociale à ces progrès élémentaires, les possédants et les détenteurs de privilèges et de pouvoir dépensent plus de 2 000 milliards USD par an en armes et plusieurs milliers de milliards en forces de l’ordre (de l’armée à la police)12.

Septième thèse : la rationalité du racisme et du patriarcat

Il convient de remarquer que, dans un système capitaliste, les structures du racisme et du patriarcat restent rationnelles. Pourquoi ? Dans Le Capital, Marx a détaillé deux façons d’extraire de la plus-value, mais il en a aussi évoqué une troisième. Les deux premières formes (la plus-value absolue et la plus-value relative) ont été décrites et analysées dans le détail. Il a mis en évidence la manière dont, en volant au travailleur du temps au cours de sa journée de travail, le capitaliste extrait la plus-value absolue du travailleur salarié. Il a également souligné que tout gain de productivité raccourcit le temps nécessaire aux travailleurs pour produire leur salaire et augmente la quantité de plus-value qu’ils produisent (plus-value relative). Marx a également suggéré une troisième façon d’extraire de la plus-value, à savoir quand, dans certains cas, les travailleurs sont payés moins que ce que justifierait toute notion civilisée de salaire à ce moment donné de l’histoire. Marx fait remarquer que les capitalistes tentent de « faire baisser le salaire du travailleur en deçà de la valeur de sa force de travail ». Il ne s’est toutefois pas attardé sur ce dernier cas de figure parce que, pour son analyse, il est important que la force de travail soit achetée et vendue à sa pleine valeur13.

Pour notre analyse, cette considération, que nous appelons surexploitation, n’est en rien « immatérielle » dès lors qu’elle constitue l’une des pierres angulaires du débat sur l’impérialisme. Comment justifier la suppression des salaires et le refus d’augmenter les taxes sur l’extraction des matières premières ?

Au cours de la dernière décennie, les grèves générales ont mobilisé de 300 millions de travailleurs par an.

En avançant un argument colonial selon lequel, dans certaines parties du monde, les gens ont moins d’attente de la vie, de sorte que l’on peut se permettre de négliger leur développement social. Cet argument colonial vaut également pour le vol des salaires des femmes dont le travail domestique est extrêmement mal ou pas rémunéré, sous prétexte qu’il s’agit d’un « travail de femmes »14. Un projet socialiste échappe au piège des structures du racisme et du patriarcat, dans la mesure où il n’en a pas besoin pour augmenter la part de la plus-value du capitaliste. Cependant, le fait que ces structures existent depuis des siècles et aient été renforcées par le système capitaliste a créé des habitudes qu’il est difficile d’effacer par une simple réforme de la loi. Pour cette raison, une lutte politique, culturelle et idéologique doit être menée contre les structures du racisme et du patriarcat et doit être traitée avec autant d’importance que la lutte des classes.

Huitième thèse : la sauvegarde de la vie collective

La mondialisation néolibérale a mis à mal le sens de la collectivité et rendu cette atomisation encore plus désespérante par le biais de deux processus interconnectés :

  • D’une part, l’affaiblissement du mouvement syndical et des possibilités socialistes que comportent l’action publique et la lutte des travailleurs enracinées dans le syndicalisme.

  • D’autre part, le remplacement de la notion de citoyen par celle de consommateuren d’autres termes, l’idée que l’être humain est avant tout un consommateur de biens et de services, et que l’on prend mieux la mesure de la subjectivité humaine à travers les désirs matériels.

L’effondrement de la collectivité sociale et l’essor du consumérisme exacerbent le désespoir, qui fait place au repli sur soi. En voici deux exemples : a) un repli sur les réseaux familiaux, incapables de répondre aux pressions imposées par la réduction des services sociaux, l’augmentation du travail domestique pesant sur la famille, la longueur des journées de travail et des déplacements vers et depuis le lieu de travail ; b) une évolution vers des formes de toxicité sociale par des voies telles que la religion ou la xénophobie. Bien que ces voies offrent des possibilités d’organiser la vie collective, elles sont organisées non pas en vue du progrès humain, mais pour restreindre les possibilités sociales.

Comment sauvegarder la collectivité ? Les formes d’action publique fondées sur l’aide sociale et la joie culturelle constituent des antidotes indispensables à cette désolation. Imaginez des journées d’action publique, enracinées dans les traditions de gauche, chaque mois, chaque semaine, attirant de plus en plus de personnes autour d’activités qui contribuent à raviver la vie collective.

L’une de ces activités est la Journée des livres rouges (Red Books Day), qui a été inaugurée par l’Union internationale des éditeurs de gauche le 21 février 2020, date anniversaire de la publication par Marx et Engels du Manifeste communiste. En 2020, lors de la première Journée des livres rouges, quelques centaines de milliers de personnes à travers le monde se sont rendues dans des lieux publics et ont lu le manifeste dans leur langue, du coréen à l’espagnol. En 2021, en raison de la pandémie, la plupart des événements se sont déroulés en ligne et il serait difficile de savoir combien de personnes ont participé à la Journée des livres rouges. Cependant, en 2022, près de 750 000 personnes ont participé aux différentes activités.

Cette volonté de sauvegarder la vie collective s’est illustrée de manière éclatante pendant la pandémie, lorsque les syndicats et les organisations de jeunesse, les organisations de femmes et les syndicats étudiants ont investi les lieux publics du Kerala (Inde) pour construire des lavabos, coudre des masques, mettre en place des cuisines collectives, apporter de la nourriture et faire du porte à porte pour demander à chacun ce dont il avait besoin15.

Thèse neuf : la bataille des émotions

Fidel Castro a provoqué un débat dans les années 1990 autour du concept de la bataille des idées, la lutte des classes dans la pensée contre les banalités des conceptions néolibérales de la vie humaine. Un élément clé des discours de Fidel à cette époque tenait non seulement à ce qu’il disait, mais aussi la manière dont il le disait, chaque mot étant empreint de la grande compassion d’un homme engagé dans la libération de l’humanité des tentacules de la propriété, des privilèges et du pouvoir. En fait, la Bataille des idées ne portait pas seulement sur les idées en soi, mais aussi sur une « bataille des émotions », une tentative de déplacer la palette des émotions d’une fixation sur la cupidité à des considérations d’empathie et d’espoir.

Les luttes « communautaires » font partie intégrante de la vie des travailleurs et des paysans ; en s’y engageant, les syndicats s’enracinent dans le projet de sauvegarde de la vie collective.

L’un des grands défis de notre époque est le recours de la bourgeoisie aux industries culturelles et aux institutions éducatives et religieuses pour détourner l’attention de toute discussion substantielle sur les problèmes réels — et sur la recherche de solutions communes aux dilemmes sociaux — au profit d’une obsession pour les problématiques imaginaires. En 1935, le philosophe marxiste Ernst Bloch a nommé cela « l’escroquerie de l’accomplissement », l’ensemencement d’une série de fantasmes pour masquer leur impossible réalisation. Le bénéfice de la production sociale, écrit Bloch, « est récolté par la grande couche supérieure capitaliste, qui emploie des rêves chimériques contre les réalités prolétariennes »14. L’industrie du divertissement érode la culture prolétarienne avec l’acide des aspirations qui ne peuvent être satisfaites dans le système capitaliste. Ces aspirations sont, toutefois, suffisantes pour affaiblir tout projet de la classe travailleuse. Une société dégradée sous le capitalisme produit une vie sociale imprégnée d’atomisation et d’aliénation, de désolation et de peur, de colère et de haine, de ressentiment et d’échec. Il s’agit d’émotions hideuses qui sont façonnées et encouragées par les industries culturelles (« tout ceci est à votre portée »), les établissements d’enseignement (« la cupidité comme moteur principal ») et les néofascistes (« haïssez les immigrés, les minorités sexuelles et tous ceux qui vous privent de vos rêves »). L’emprise de ces émotions sur la société est quasi absolue et constitue la base de la montée des néofascistes.

Nous ressentons un grand vide, peut-être à cause d’une société du spectacle qui a fait son temps.

Dans une perspective marxiste, la culture n’est pas considérée comme un aspect isolé et intemporel de la réalité humaine, pas plus que les émotions ne sont considérées comme un monde à part entière ou comme étant en dehors des développements de l’histoire. Puisque les expériences humaines sont définies par les conditions de la vie matérielle, les idées de destin indépassable perdureront tant que la pauvreté sera une caractéristique de la vie humaine. Si la pauvreté est dépassée, alors le fatalisme aura une base idéologique moins sûre, mais il ne sera pas automatiquement dépassé.

Les cultures sont contradictoires. Elles rassemblent une série d’éléments de manière inégale à partir du tissu social d’une société inégalitaire qui oscille entre la reproduction de la hiérarchie de classe et la résistance aux éléments de la hiérarchie sociale. Les idéologies dominantes inondent tel un raz de marée la culture à travers les tentacules des appareils idéologiques, submergeant au passage les expériences réelles de la classe travailleuse et de la paysannerie. C’est, après tout, par la lutte des classes et par les nouvelles formations sociales créées par les projets socialistes que de nouvelles cultures seront engendrées — et pas seulement par de simples vœux pieux.

Il est important de rappeler que, dans les premières années de chacun des processus révolutionnaires — de la Russie en 1917 à Cuba en 1959 — l’efflorescence culturelle était saturée d’émotions de joie et de possibilités, d’intense créativité et d’expérimentation. C’est cette sensibilité qui offre une fenêtre sur autre chose que les émotions macabres de la cupidité et de la haine.

Dixième thèse : oser imaginer l’avenir

L’un des mythes persistants de l’ère post-soviétique est qu’il n’existe aucune possibilité d’avenir post-capitaliste. Ce mythe nous est venu de la classe intellectuelle étasunienne triomphaliste, dont la sensibilité à la « fin de l’histoire » a contribué à renforcer l’orthodoxie dans des domaines tels que l’économie et la théorie politique, empêchant ainsi toute discussion ouverte sur le post-capitalisme.

Même lorsque l’économie orthodoxe n’a pas pu expliquer la prévalence de crises, notamment l’effondrement économique total de 2007-2008, le champ lui-même a conservé sa légitimité. Ces mythes ont été popularisés par les films et les émissions de télévision d’Hollywood, où les films catastrophes et dystopiques suggéraient la destruction de la planète plutôt qu’une transformation socialiste. Il est plus facile d’imaginer la fin du monde qu’un monde socialiste.

Au cours de l’effondrement économique, l’expression « too big to fail » (trop gros pour faire faillite) s’est imposée dans la conscience publique, renforçant la nature éternelle du capitalisme et même les dangers des tentatives d’en ébranler les fondements. Le système est resté au point mort. L’austérité a frappé les précaires. Les petites entreprises se sont effondrées faute de crédit. Et pourtant, il n’y a pas eu de réflexion de masse pour dépasser le capitalisme. La révolution mondiale n’était pas envisagée à l’horizon immédiat. Cette réalité partielle a étouffé tout espoir dans la possibilité de dépasser ce système, un système — trop gros pour faire faillite — qui semble désormais éternel. Nos traditions plaident contre le pessimisme, en faisant valoir que l’espoir doit structurer nos interventions du début à la fin. Mais quel est le fondement matériel de cet espoir ? Ce fondement se retrouve à trois niveaux.

  • Les faits persistants de la faim et de l’analphabétisme, de l’absence de logement et de l’indignité ne peuvent être rendus invisibles. De même, les personnes privées de leurs droits fondamentaux ne seront pas réduites au silence et leurs conditions matérielles ne disparaîtront pas si l’on ne s’attaque pas à ces faits persistants. La désolation et la colère sont les produits de ce déni.

  • Les progrès massifs de la production mondiale tant dans l’agriculture et l’industrie que dans le secteur des services — nous ont permis d’imaginer un monde qui dépasse la nécessité et ouvre la porte à la liberté. On ne peut pas être libre simplement par décret légal. La liberté exige que les maux persistants de la vie sous le capitalisme soient dépassés.

  • Depuis plusieurs décennies, nous vivons dans un monde qui a la capacité de répondre aux besoins de l’humanité. Ces progrès massifs de la production mondiale ont été réalisés non seulement grâce aux avancées scientifiques et technologiques, mais aussi, et surtout grâce à la socialisation du travail. Dans le cadre du système désigné comme mondialisation, l’ensemble du processus est envisagé du point de vue du capital et des rendements d’échelle accrus. En revanche, ce dont il n’est pas tenu compte, c’est que ces avancées massives dans la production mondiale ont eu lieu parce que les travailleurs travaillent désormais les uns avec les autres par-delà les océans et que cette socialisation du travail démontre l’intégration de la classe travailleuse internationale. Une telle socialisation du travail va à l’encontre des limites étroites et étouffantes de la propriété privée, qui freine tout progrès pour sa propre cupidité. Le choc entre la socialisation du travail et la propriété privée approfondit les luttes pour la socialisation de la propriété — la base du socialisme moderne — comme Marx l’avait prédit.

Le capitalisme a déjà échoué. Il n’est pas en mesure de s’attaquer aux questions fondamentales de notre époque, ces faits persistants — tels que la faim et l’analphabétisme — qui nous crèvent les yeux. Il ne suffit pas de subsister. Il faut pouvoir vivre et s’épanouir. C’est l’état d’esprit qui exige une transformation révolutionnaire.

Nous devons raviver notre tradition de marxisme de libération nationale, mais aussi élaborer la théorie de notre tradition à partir de la pratique de nos mouvements. Nous devons davantage nous inspirer des théories de Hô Chi Minh, de Fidel Castro, d’E. M. S. Namboodiripad et de Claudia Jones. Non seulement ils ont agi, mais ils ont également produit des théories innovantes. Il convient de développer ces théories et les mettre à l’épreuve dans notre réalité contemporaine, en construisant notre marxisme non pas uniquement à partir des classiques — dont l’utilité n’est aucunement remise en question mais aussi à partir des faits de notre présent. L’« analyse concrète d’une situation concrète » de Lénine exige de consacrer une attention particulière au concret, au réel et aux faits historiques. Nous avons besoin d’évaluer notre époque de façon plus factuelle, ainsi que d’un portrait plus fidèle de l’impérialisme actuel, qui impose sa puissance militaire et politique pour gommer la nécessité d’un monde socialiste.

C’est précisément en cela que consiste le programme du Tricontinental : Institut de recherche sociale, de la trentaine d’instituts de recherche avec lesquels nous collaborons étroitement par le biais du Network of Research Institute, et des plus de 200 mouvements politiques dont les objectifs aiguillent le développement du programme de recherche du Tricontinental par le biais de l’Assemblée internationale des peuples.

C’est par la lutte des classes que de nouvelles cultures seront engendrées — et pas seulement par de simples vœux pieux.

Certes, le socialisme ne va pas apparaître par magie. Il exige qu’on se batte pour le construire, qu’on approfondisse nos luttes, qu’on resserre nos liens sociaux et qu’on enrichisse nos cultures. Le moment est venu d’établir un front uni, de rassembler la classe travailleuse et la paysannerie ainsi que les classes alliées, d’accroître la confiance des travailleurs et de clarifier notre théorie. Pour unir la classe travailleuse et la paysannerie ainsi que les classes alliées, il faut l’unité de toutes les forces de gauche et progressistes. En ces temps de grand danger, nos divisions ne doivent pas occuper une place centrale ; notre unité est essentielle. L’humanité l’exige.

Cet article a été initialement publié sur le site de l’institut Tricontinental, le 20 septembre 2022. Il est basé sur une conférence donnée par Vijay Prashad à la Casa de las Americas, à Cuba, en juillet 2022.

Footnotes

  1. La Casa de las Américas (en français : « Maison des Amériques ») est un organisme culturel cubain créé à La Havane le 28 avril 1959 par le gouvernement de Fidel Castro après sa prise de pouvoir la même année.
  2. Karl Marx et Friedrich Engels, L’Idéologie allemande (Moscou : Progress Publishers, 1968).
  3. Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, Building a Common Vision for Sustainable Food and Agriculture. Principles and Approaches (Rome: FAO, 2014); FAO, FIDA, UNICEF, PAM et OMS, L’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2022 : Réorienter les politiques alimentaires et agricoles pour rendre l’alimentation saine plus abordable, FAO, 2022, p. vi.
  4. Fidel Castro, Déclaration à l’Assemblée générale des Nations unies, en qualité de président du Mouvement des non-alignés, 12 octobre 1979.
  5. « Dans les ruines du présent », document de travail n° 1, Tricontinental : Institut de recherche sociale, 1 mars 2018.
  6. Govindan Raveendran et Joann Vanek, « Informal Workers in India: A Statistical Profile » Statistical Brief 24 (Les femmes dans l’emploi informel : mondialisation et organisation, août 2020), 1 ; « The Farmers’ Revolt in India, dossier 41 », Tricontinental : Institute for Social Research, 14 juin 2021.
  7. Frantz Fanon, The Wretched of the Earth, trans. Richard Philcox, Grove Press, p. 5.
  8. Organisation de coopération et de développement économiques, « Perspectives mondiales du financement du développement durable 2021 », 9 novembre 2020.
  9. Tricontinental : Institut de recherche sociale, « Servir le peuple : l’éradication de l’extrême pauvreté en Chine », Lava, 23 juillet 2021.
  10. FAO et al., L’état de la sécurité alimentaire, vi.
  11. Lusaka Times, « Over 60% Copperbelt Province Lower Primary Pupils Can’t Read and Write — PEO », Lusaka Times, 18 janvier 2018.
  12. Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, « World Military Expenditure Passes $2 Trillion for First Time », SIPRI, 25 avril 2022.
  13. Karl Marx, Le Capital : critique de l’ économie politique — Volume I.
  14. Ernst Bloch, Heritage of Our Times, trad. Neville et Stephen Plaice (Berkeley ; Los Angeles: University of California Press, 1991), 103.