Monocle

Pourquoi notre culture est-elle obsédée par l’expérience individuelle?

Anna Kornbluh

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Daniel Zamora

—26 juin 2024

De l’art immersif aux essais personnels en passant par les romans à la première personne, notre culture est obsédée par l’idée de l’expérience individuelle. Anna Kornbluh, auteure de “Immediacy, or The Style of Too Late Capitalism”, a expliqué à Jacobin la raison de ce phénomène.

Daniel Zamora. Vous commencez votre livre en évoquant la prolifération des expositions de peinture dites «immersives ». Les «expériences» de Vincent Van Gogh, Frida Kahlo ou Claude Monet fleurissent dans le monde entier. Cette évolution peut être envisagée d’un point de vue économique. De telles expositions sont évidemment facilement reproductibles et moins coûteuses que des expositions plus traditionnelles. Mais d’après vous, cela cache autre chose. De quoi s’agit-il ?

Anna Kornbluh. Le livre s’intéresse aux raisons pour lesquelles la représentation fait l’objet de si nombreuses pressions à l’heure actuelle. On a l’impression que les gens n’ont pas de temps à consacrer à l’art, que nous ne pouvons pas nous permettre la lenteur de pensée qu’exige la représentation. Si vous vous trouvez face à un tableau de Van Gogh, sa signification n’est pas évidente. Peut-être que l’élément qu’il a voulu mettre en avant sont les chaussures posées au sol, l’angle de la perspective, ou encore le pigment jaune de l’époque. Nous devons donc interpréter sa toile.

Si vous faites du yoga lors d’un cours immersif consacré à Van Gogh, l’objectif n’est pas la contemplation d’un tableau, mais la fusion sensorielle totale avec l’œuvre du peintre. Ce glissement de la simple contemplation à l’expérience intense de l’immersion est présenté comme libérateur, mais il s’apparente à d’autres glissements sociaux et économiques qui ne sont pas si formidables que cela.

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