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La communauté coloniale européenne

Jan Orbie

—2 avril 2025

Grâce à l’UE, l’Europe connaît une période exempte de guerre depuis 70 ans. C’est en tout cas ce qu’affirment les partisans de l’intégration européenne. Or, ceux-ci occultent le fait que l’institution reste encore aujourd’hui un projet (néo)colonial.

Le mythe de la naissance virginale

La politique frontalière de l’Union européenne (UE) fait des victimes. Le Green Deal européen ne fait pas le poids face aux lobbies économiques. Pendant ce temps, l’UE poursuit ses efforts pour conclure des accords de libre-échange de grande envergure. Le Global Gateway doit garantir les intérêts européens dans le Sud global, tout en rivalisant avec la Chine sur le continent africain. La réglementation sur les matières premières critiques promeut l’extraction de matières premières à l’intérieur et à l’extérieur de l’UE. L’industrie européenne de la défense reçoit des ressources supplémentaires, tandis que les gouvernements nationaux doivent encore davantage serrer la vis. L’UE adopte cependant une position très tiède sur le génocide de Gaza : les exportateurs travaillant dans les colonies illégales de Palestine peuvent exporter sans problème vers le marché européen. Pour les progressistes, ces critiques des politiques actuelles de l’UE ne sont pas neuves – ils dénoncent souvent la droitisation et la marchandisation du projet européen1.

Ce qui était autrefois une belle histoire de paix et de prospérité a pratiquement été détruit au cours des dernières décennies. Mais ce n’est pas que l’UE était initialement un projet de paix – lors de la création de la Communauté économique européenne (CEE ou Traité de Rome) dans les années 1950 – et qu’elle s’est ensuite progressivement éloignée de ses idéaux initiaux. Dès le départ, quelque chose n’allait pas dans ce projet européen.

Cela n’a pas été très visible pendant longtemps en raison de la persistance de deux mythes : le « mythe de la paix » et le « mythe de la naissance virginale »2. Ces mythes soulignent qu’après deux guerres sanglantes, les pays européens ont mis en place une construction européenne pour réaliser la paix. Dans le même temps, les colonies de ces pays européens ont aussi obtenu leur indépendance. Un genre de projet européen postcolonial a alors vu le jour. D’où la naissance virginale. La CEE entamait un nouveau chapitre et laissait derrière elle les guerres et la colonisation, celles-ci étant censées appartenir au passé.

Alors que le Traité de Rome était en cours de négociation, quatre des six gouvernements impliqués poursuivaient des politiques coloniales violentes et répressives.

Mais des recherches récentes, notamment sur base d’archives rendues publiques, montrent clairement comment la CEE a dû satisfaire les ambitions coloniales persistantes des États membres3. Le projet européen était conçu comme une tentative de contrer la décolonisation imminente et de réinventer le colonialisme européen à une plus grande échelle. La CEE n’entamait donc pas un nouveau chapitre dans son histoire coloniale sanglante ; l’idée était plutôt de poursuivre les agendas coloniaux de manière différente. Ainsi, ce projet européen s’inscrit dans un énième recyclage du projet colonial-capitaliste : plus ça change, plus c’est pareil.

Avant d’examiner comment la CEE a poursuivi la politique coloniale, il est nécessaire de rappeler brièvement le contexte historique et idéologique dans lequel la Communauté coloniale européenne a pu voir le jour.

Contexte historique : décolonisation et influence des États-Unis

Rappelons d’abord le contexte historique dans lequel l’UE a été fondée. Les négociations pour la CEE ont eu lieu à Val-Duchesse entre 1955 et 1957. Selon la propagande de l’UE et les livres d’histoire, le but était d’établir la paix par le biais d’une coopération économique concrète. Les États-nations que sont la France et l’Allemagne, malgré leurs profondes divergences, ancreraient leur réconciliation dans le projet européen. Grâce à une sorte de main invisible, le libre-échange apporterait non seulement la prospérité, mais aussi la paix en Europe. Les États-nations deviendraient des États membres, si étroitement imbriqués qu’une guerre serait impensable.

Ce qu’on oublie ici, c’est que les États-nations sont plutôt l’exception. En réalité, nous n’avons pas tant affaire à des États-nations, mais plutôt à des États coloniaux et impériaux4. Alors que le Traité de Rome est en cours de négociation, quatre des six gouvernements – la France et la Belgique, bien sûr, mais aussi, dans une moindre mesure, les Pays-Bas et l’Italie – continuent à mener des politiques coloniales marquées par la violence et la répression. Le gouvernement allemand, quant à lui, nourrit encore des ambitions coloniales.

Cependant, il devient rapidement évident qu’il va être difficile pour ces pays de maintenir ces positions de domination. Nous revenons ici brièvement sur certains des événements qui se sont déroulés avant et pendant les négociations du traité CEE. Ils montrent comment la politique coloniale était sous pression.

  • En 1954, plusieurs colonies obtiennent leur indépendance. C’est le cas de l’Indochine, dont la chute a été très douloureuse pour la France, qui cherche à tout prix à éviter le même scénario avec les colonies africaines.
  • La même année, soit un an avant le début des négociations de la CEE, commence la guerre d’indépendance algérienne. C’est également un choc pour la France, qui considère l’Algérie comme faisant partie de son territoire et qui réprime dès lors violemment toute opposition à ce fait.
  • En 1955 a lieu la conférence de Bandung, une impressionnante méga-coalition africaine et asiatique anticoloniale s’opposant aux puissances occidentales, et qui a réussi à se maintenir dans le contexte de l’après-guerre et de la guerre froide.
  • En 1956 éclate la crise du canal de Suez, qui est d’une importance cruciale pour les négociations de la CEE. La nationalisation du canal de Suez par le président égyptien Gamal Abdel Nasser, l’incapacité du Royaume-Uni et de la France à s’y opposer et la réticence des États-Unis à intervenir entraînent une douloureuse humiliation des puissances coloniales.
  • La même année, la Tunisie et le Maroc obtiennent également leur indépendance (partielle) de la France.
  • Enfin, en Afrique de l’Ouest, le 15 mars 1957 (soit dix jours avant la signature du traité CEE !), le Ghana obtient son indépendance sous l’impulsion de Kwame Nkrumah, intellectuel inspirant et combattant pour l’indépendance. Bien que le Ghana soit une colonie britannique et ne fasse donc pas partie du projet de la CEE, son indépendance a eu un impact majeur sur la vague imminente de décolonisation. En 1945, lors du Congrès de Manchester, Kwame Nkrumah, ce défenseur influent du panafricanisme, avait déjà contribué à renforcer la position du cinquième congrès panafricain en faveur de la décolonisation et d’une union panafricaine. En 1958, il organisera la Conférence des peuples africains à Accra, où il réitérera son appel à la décolonisation et à l’unité panafricaine. L’idée centrale est que l’indépendance nationale ne suffit pas : pour maintenir leur souveraineté, les colonies doivent former un seul bloc contre les anciens colonisateurs5.

Dans le même temps, la puissance étasunienne s’est accrue. Grâce au plan Marshall et à d’autres initiatives, les groupes industriels et financiers étasuniens ont renforcé leur impact sur les économies européennes occidentales. Les entreprises françaises et belges opérant dans les colonies doivent de plus en plus tolérer l’ingérence des capitaux étasuniens. La domination des États-Unis sur l’Europe (occidentale) affaiblie après la Seconde Guerre mondiale est indéniable. À cela vient donc s’ajouter la crainte de perdre les colonies en Afrique. Comme nous l’avons mentionné, les Français et les Britanniques avaient été humiliés par la position des États-Unis pendant la crise de Suez. Les Étasuniens n’étaient pas opposés à la décolonisation, à condition que celle-ci serve leurs intérêts.

Contexte idéologique : l’Eurafrique

Ainsi, lorsque les négociateurs européens, qui étaient tous des hommes – pour la plupart démocrates-chrétiens –, ont négocié le traité CEE, ils craignaient de perdre leur influence coloniale. À l’époque, les Européens craignaient de ne plus jouer aucun rôle dans la politique mondiale et de devenir des pions dans la logique de la guerre froide. Les intellectuels exprimaient bruyamment leurs craintes de voir la civilisation européenne s’effondrer. La perte des colonies contribuait à la crise existentielle de l’Europe.

Dans le même temps, les élites d’Europe occidentale étaient déterminées à conserver leurs colonies africaines. L’idéologie qui devait légitimer la poursuite de l’entreprise coloniale peut être résumée par le nom d’« Eurafrique »6. L’Europe continuerait à jouer un rôle mondial important en formant un seul bloc géopolitique avec l’Afrique. Aujourd’hui, le terme « Eurafrique » est tombé en désuétude, mais, dans les années 1930 à 1950, il occupait une place importante dans les discussions politiques et intellectuelles sur l’avenir de la civilisation européenne. Les grands partisans d’une fédération européenne, comme le comte Richard Coudenhove-Kalergi, étaient également des partisans de l’eurafricanisme.

La pensée eurafricaine a connu plusieurs variantes et évolutions, mais on peut la résumer en cinq points clés7 :

1. L’Europe et l’Afrique présentent un lien organique. Les deux continents partagent une histoire commune et forment un bloc politique, économique et culturel cohérent.

2. Il existe une division claire du travail au sein de ce bloc. Ou, comme l’a dit le comte Coudenhove-Kalergi : « L’Europe est la tête et l’Afrique est le corps de l’Eurafrique.»8

3. L’Europe doit s’unir pour exploiter efficacement l’Afrique. Ce n’est qu’en alignant les agendas coloniaux que la colonisation peut se poursuivre.9

4. C’est d’autant plus urgent que l’Europe (et l’Afrique) doit se défendre contre des blocs géopolitiques hostiles. Il s’agit en particulier de la « pan-Amérique » dirigée par les États-Unis, et des puissances asiatiques.

5. Tout cela profiterait à la civilisation et au développement de l’Afrique. Au final, tout le monde serait gagnant dans le projet eurafricain.

Cet eurafricanisme était donc l’état d’esprit qui régnait en arrière-fond de la création de la CEE. Nous verrons que cette pensée reste d’actualité. Mais d’abord, examinons plus en détail la manière concrète dont la CEE a repris les ambitions coloniales.

Le Traité de Rome : la Communauté coloniale européenne

C’est dans le contexte historique et idéologique que nous venons de décrire que les négociateurs ont rédigé le traité CEE. Bien sûr, le Traité de Rome a de nombreux pères – dont les États-Unis, les intérêts industriels de l’Allemagne et les lobbies agricoles français. Mais les agendas coloniaux ont été un moteur important et à peine reconnu : il fallait contrer les projets de décolonisation et de panafricanisation par la construction de cette communauté eurafricaine.

Les six membres fondateurs ont toujours été d’accord sur le fait que la CEE engloberait le projet eurafricain. Ils partageaient des ambitions coloniales, mais n’avaient évidemment pas les mêmes intérêts. Pour la France, le fait que le projet européen s’étende aux colonies et que les cinq autres États membres cofinancent la colonisation constituait une condition sine qua non. Les autres États membres étaient moins enthousiastes à l’idée de contribuer financièrement aux colonies françaises, mais ils voyaient l’avantage d’avoir, en échange, accès aux marchés africains pour le commerce et les investissements. Quant à l’Allemagne, elle avait dû à regret céder des colonies après la Première Guerre mondiale et était désireuse de poursuivre son exploitation de l’Afrique. Le lendemain même des négociations du Traité de Rome, le New York Times titrait déjà : « Les Allemands vont en Afrique », révélant que ceux-ci envoyaient une mission d’exploitation des matières premières. L’Italie, elle, voyait dans les « territoires » africains un moyen de résoudre son problème de « surpopulation ». Le gouvernement italien voulait en effet résoudre les problèmes sociaux en envoyant des familles italiennes pauvres en Afrique.

Jan Orbie est professeur au Département de sciences politiques de l’Université de Gand, où il enseigne et mène des recherches sur les relations extérieures de l’Union européenne.

La Belgique a principalement suivi l’agenda français, même si notre royaume a dû accepter à contrecœur une clé de répartition budgétaire qui l’obligeait à payer plus aux colonies françaises qu’elle ne recevait en retour pour le Congo belge. Néanmoins, les dispositions du Traité de Rome en matière de commerce et d’investissement ont été formulées de manière à ce que les intérêts économiques de la Belgique au Congo soient également bien servis10.

Et puis le Traité de Rome est entré en vigueur. Jean Monnet, l’un des pères fondateurs de l’UE, aurait qualifié l’Afrique de « dot française à l’Europe ». Le ministre français des Affaires étrangères, Paul Reynaud, voyait dans la CEE une « exploitation européenne commune » de l’Afrique. Après la crise de Suez, le chancelier allemand Konrad Adenauer consolait son homologue français en lui disant que la CEE serait la « revanche » de l’Europe pour la nationalisation du canal de Suez. Dans ce contexte, le 25 mars 1957, jour anniversaire de la fondation de la CEE, Louis Armand, premier président d’Euratom, déclarait qu’il faudrait ériger une statue à Nasser, véritable unificateur de l’Europe, car c’est grâce à l’humiliation coloniale en Égypte que les négociations pour la CEE s’étaient accélérées11.

En arrière-fond de la création de la CEE régnait un état d’esprit : il fallait contrer les projets de décolonisation et de panafricanisation par la construction d’une communauté eurafricaine.

Si l’on examine de plus près les dispositions du Traité de Rome, ce qui est le plus frappant, c’est ce qui en est absent : il ne comprend aucune disposition pour une possible décolonisation. En ce sens, il semblait aussi aveugle que le fameux plan Van Bilsen de 1955, qui prévoyait l’indépendance du Congo belge endéans les 30 ans (et qui était considéré à l’époque comme radical !). L’indépendance des colonies africaines n’était manifestement pas envisageable. Selon la carte de l’époque de la CEE, la majorité du territoire européen se trouve … en Afrique (Congo, Algérie, Mali, Niger, Kenya …)

Toutefois, le traité comportait diverses dispositions pour concrétiser le projet eurafricain. La partie IV traite de l’« association » avec des « pays et territoires d’outre-mer » (le terme « colonies » est évité). Cette « association » devait permettre le libre-échange et les investissements entre les six États membres et leurs colonies. Il s’agissait plus précisément des colonies françaises (Sénégal, Guinée, Côte d’Ivoire, Tchad, Madagascar, Togo, par exemple), belges (Congo belge et Ruanda-Urundi), italiennes (Somalie sous tutelle italienne) et néerlandaises (Nouvelle-Guinée)12. Ainsi, la CEE couvrait un territoire considérable, avec l’Afrique comme centre de gravité. Un Fonds européen de développement spécial a également été créé, principalement pour promouvoir les investissements au profit des groupes économiques des métropoles.

Il est tout aussi frappant de constater que l’Algérie faisait partie intégrante de la CEE (article 227). Il n’était pas question ici d’une « association » : l’Algérie était en fait le septième État membre de la CEE. Toutefois, les dispositions relatives à l’Algérie étaient délibérément restées vagues dans le traité, de sorte que l’Algérie était reconnue comme faisant partie de la France, mais pas au point que les Algériens puissent en tirer un quelconque avantage13. Les dirigeants de la Belgique, des Pays-Bas, du Luxembourg, de l’Italie et de l’Allemagne reconnaissaient de fait que l’Algérie faisait désormais partie de la France, et donc de la CEE, malgré la terrible guerre d’indépendance qui faisait rage depuis 1954 – tout en restant silencieusement sur la touche pendant que la France menait la guerre coloniale, ce qui, soit dit en passant, s’appliquait également à l’intervention militaire unilatérale de la Belgique au Congo peu après l’indépendance en juillet 1960.

En outre, le traité CEE contenait plusieurs dispositions juridiques subtiles refusant aux personnes originaires d’Algérie et des autres colonies – c’est-à-dire non pas les « Européens », mais plutôt la population « d’origine » – l’accès au marché du travail européen et à d’autres droits démocratiques. La recherche juridique a montré en détail comment les dispositions du traité CEE, en conjonction avec la législation nationale, signifiaient que les « citoyens » de couleur de la CEE ne jouiraient pas des mêmes droits que les « vrais » Européens14. Les avantages des États-providence, que les six membres de la CEE étaient en train de mettre en place à l’époque, ont également largement échappé aux habitants des colonies. En bref, la CEE était une communauté raciste qui poursuivait les rapports de force coloniaux sous un masque juridico-économique.

Néocolonialisme

Puis vint la vague des indépendances africaines au début des années 1960. Si elles n’étaient pas prévues dans le traité CEE, les élites politiques et économiques d’Europe occidentale ne pouvaient plus s’y opposer. Celles-ci ont donc changé leur fusil d’épaule pour tenter de maintenir les rapports de force coloniaux par d’autres moyens, essentiellement par une politique néocoloniale, telle que prédite et décrite par Nkrumah : grâce à un enchevêtrement d’accords commerciaux, de « programmes de développement » et d’interventions politico-militaires, couplé à la complicité des élites locales, la colonisation se poursuit de facto15. Les schémas classiques restent alors les mêmes : les pays africains fournissent des matières premières, les anciens colonisateurs créent de la valeur ajoutée et exportent des produits finis vers le Sud. Comme l’ont théorisé Edward Saïd et les penseurs postcoloniaux, une dimension cognitive joue également : de manière assez subtile, la poursuite de l’exploitation est légitimée par la présentation de l’« autre » comme inférieur, arriéré ou dangereux.

La politique néocoloniale de la CEE s’est manifestée concrètement dans les traités de Yaoundé de 1963 et 1969, qui assuraient le maintien de l’accès aux marchés coloniaux. La CEE a également continué à investir dans ces pays par le biais du Fonds européen de développement. Pendant des décennies, la direction générale du développement de la Commission européenne allait être peuplée d’anciens fonctionnaires coloniaux, qui ont largement contribué à sauvegarder les intérêts européens sous le couvert de l’« aide »16. Les conventions de Lomé (1975, 1980, 1985, 1990), de Cotonou (2000) et de Samoa (2024) comportent toutes des nouveautés intéressantes, mais poursuivent essentiellement les schémas de pouvoir néocoloniaux avec les anciennes colonies d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique Sud17.

Depuis les années 2000, l’UE s’efforce de conclure des accords de partenariat économique (APE) avec d’anciennes colonies. Ces accords commerciaux favorisent une libéralisation et une ouverture des marchés de grande envergure et renforcent la dynamique du « diviser pour mieux régner » depuis l’UE18. Un nouvel APE de ce type avec le Kenya est entré en vigueur le 1er juillet 2024. Il bénéficiera à quelques secteurs spécifiques (notamment l’agriculture), mais, dans le même temps, il perpétue les relations coloniales et complique l’intégration régionale au sein de la Communauté d’Afrique de l’Est (avec la Tanzanie, l’Ouganda, le Burundi et le Rwanda).

Ce qui est le plus frappant, c’est ce qui en est absent : le Traité de Rome ne comprend aucune disposition pour une possible décolonisation. L’indépendance des colonies n’était manifestement pas envisageable.

En substance, l’UE a donc poursuivi sa politique coloniale autant que possible « indirectement », parfois en alliance avec les élites africaines, et dans l’ombre des États-Unis avec le « consensus de Washington » sur la privatisation, la libéralisation et la déréglementation. La variante la plus récente de ce consensus est le « consensus de Wall Street », dans lequel les « programmes de développement » s’inscrivent de plus en plus dans des logiques financières. Pour ce faire, le rayon d’action de la Banque européenne d’investissement a également été élargi en Afrique19.

Ce qui a changé, c’est le discours : dans les années 1960, le concept d’Eur-afrique a brusquement disparu des débats pour faire place à un discours de « développement » et de « partenariat équitable »20. La légitimité des interventions de l’Europe dans le Sud repose désormais sur son rôle de « puissance civile » dans la politique mondiale, qui aidera les « pays en développement » à se moderniser par le biais de l’aide et des relations commerciales. Mais, comme les penseurs anticoloniaux l’avaient prédit depuis longtemps (voir ci-dessous), ce discours sert principalement les intérêts européens et détourne l’attention des plaidoyers en faveur d’un renversement plus radical des rapports de force (ou d’une véritable décolonisation).

Global Gateway : des échos eurafricains

Début 2024, l’UE a adopté la réglementation sur les matières premières critiques (Critical Raw Materials Act, ou CRMA), qui doit notamment assurer un approvisionnement stable en matières premières nécessaires à la « transition verte », mais aussi aux industries européennes de la défense et de l’aérospatiale. Le CRMA prévoit des « partenariats stratégiques », par exemple avec le Congo, la Namibie, la Zambie et le Chili, qui visent donc principalement à introduire des matières premières sur le marché européen, mais ne prévoient pas d’industrialisation locale ni de transfert de connaissances.

Depuis 2021, le Global Gateway est la nouvelle politique phare de l’UE vis-à-vis des pays du Sud global. Elle implique des investissements massifs, en particulier dans les infrastructures, dans le but de contrer l’influence de la Belt and Road Initiative (ou la nouvelle route de la soie), d’accéder à des matières premières, telles que le cobalt et le lithium, et de stimuler le « développement » des pays partenaires. Des milliards d’euros sont alloués pour faire fructifier des capitaux européens en Afrique. Le Global Gateway travaille principalement par le biais de soutien au secteur privé, par l’intermédiaire de prêts et de garanties et de banques de développement.

Le concept d’« Eurafrique » a peut-être disparu, mais les cinq points clés des années 1950 reviennent dans le discours européen sur le « Global Gateway » :

1. L’Afrique est toujours considérée comme un partenaire spécial et un allié de l’Europe, compte tenu de notre passé commun (le fait que ce passé ait consisté en esclavage, pillage et exploitation n’est pas vraiment mis en avant).

2. La division du travail est la même : ils fournissent les matières premières et nous apportons la valeur ajoutée.

3. L’idée que les pays européens devraient conspirer pour l’exploitation commune de l’Afrique refait également surface. Aujourd’hui, « Team Europe » est la nouvelle expression à la mode place Schumann. L’ensemble du secteur européen du développement – la Commission européenne, la Banque européenne d’investissement et de nombreux autres donateurs et agences dans les États membres – se réoriente actuellement vers cette « nouvelle » approche.

4. Un autre ennemi extérieur légitime la nouvelle « ruée vers l’Afrique » :
la Chine.

5. Le Global Gateway est vendu dans le cadre d’un discours sur les « partenariats », le « gagnant-gagnant » et les objectifs louables, « axés sur des valeurs » comme le climat et les droits humains.

Ainsi, d’une manière (en fait pas très) subtile, le projet colonial européen s’est poursuivi. Dans le même temps, la carte actuelle de l’UE présente encore des traces formelles et visibles de la Communauté coloniale européenne. Depuis le Brexit (2020), treize territoires sont toujours concernés : Aruba, Bonaire, Curaçao, la Polynésie française, les Terres australes et antarctiques françaises, le Groenland, la Nouvelle-Calédonie, Saba, Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Eustache, Saint-Martin et Wallis-et-Futuna. Ce n’est que lorsque des violences éclatent, comme lors les manifestations indépendantistes de mai 2024 en Nouvelle-Calédonie – contre lesquelles les Français ont envoyé des troupes militaires – qu’ils font à nouveau la une de l’actualité.

Voilà pour le mythe de la paix et de la naissance virginale. On peut donc se demander si l’UE méritait bien le prix Nobel de la paix (en 2012). Bien sûr, il y a toujours eu un désir de paix en Europe, mais la paix que l’UE incarne a toujours été superficielle et limitée à l’Europe occidentale.

Voix postcoloniales : l’Europe, c’est le colonialisme collectif et la violence fasciste

C’est l’histoire de la violence structurelle. Pas un projet de paix, pas de colonialisme à l’ancienne, mais l’enracinement du racisme et de l’exploitation sous couvert de « coopération internationale ». Ce message ne transparaît pas dans les récits classiques sur l’UE et il reste même souvent inconnu des experts de l’Union européenne. Pour les « bénéficiaires » de la politique coloniale, cependant, cela a toujours été évident. On l’observe rapidement lorsqu’on examine quelques penseurs et activistes postcoloniaux bien connus.

En 1950 déjà, Aimé Césaire écrivait que les dirigeants européens n’avaient pas l’intention de changer le cours de l’histoire. Dans son Discours sur le colonialisme, le poète et homme politique martiniquais établit une analogie entre Adolf Hitler, Konrad Adenauer et Paul-Henri Spaak. Selon lui, les dirigeants européens ne sont pas fondamentalement différents : ils poursuivent essentiellement la violence nazie et fasciste en dehors des frontières européennes21. Dans son célèbre ouvrage Les Damnés de la Terre (1961), Frantz Fanon établit également que le nazisme a transformé toute l’Europe en une grande colonie. L’Europe n’est pas un modèle à suivre pour l’Afrique, c’est un continent en stagnation. Le soi-disant humanisme européen a échoué et « le jeu européen est finalement terminé »22.

Au cours de la même période, Kwame Nkrumah écrit (1963 ; 1965) plus explicitement sur la CEE, qu’il considère comme une forme de « colonialisme collectif ». Pour lui aussi, l’Europe ne peut être un modèle pour l’unité africaine. Les nouveaux États africains devraient éviter d’entretenir des liens exclusifs avec la CEE. Les relations commerciales postcoloniales établies dans le cadre de la Convention de Yaoundé perpétuent la dépendance économique de l’Afrique et conduisent à la « balkanisation » du continent. Le Fonds européen de développement et les autres budgets d’aide ne proposent que des miettes plutôt qu’un véritable renversement des rapports de force. Pour Nkrumah, le projet eurafricain doit être remplacé par le panafricanisme.

La CEE était une communauté raciste qui poursuivait les rapports de force coloniaux sous un masque juridico-économique.

En 1972, dans son livre How Europe Underdeveloped Africa, le marxiste noir Walter Rodney décrit en détail comment la richesse européenne est liée à des siècles de pillage de l’Afrique23. Il montre clairement que, jusqu’au XVe siècle, l’Europe n’était guère plus qu’une sorte de « province » dans le monde, à peine plus avancée que les autres continents en termes de développement. Avec le développement du capitalisme et le pillage du monde, les rapports de force mondiaux ont fondamentalement changé. L’« intégration européenne » ne concerne pas ici la création des institutions de la CEE et de l’UE après la Seconde Guerre mondiale, mais plus largement la manière dont l’Europe a intégré le monde au cours des cinq cents dernières années.

Les penseurs critiques en « Occident » en étaient également conscients. En 1973, Johan Galtung, fondateur des études sur la paix, a qualifié la CEE de « loup déguisé en agneau ». L’accent mis sur l’aspect économique peut faire paraître la CEE faible et inoffensive, mais ce n’est qu’une apparence. L’Europe est une sorte de superpuissance qui se réinvente par le biais de toutes sortes d’accords commerciaux et de développement avec les gouvernements du Sud (et de l’Est, d’ailleurs). Le pouvoir structurel de la CEE consiste à forger des alliances avec les dirigeants locaux et à poursuivre une stratégie du « diviser pour mieux régner » à l’égard de ces pays24.

Ce qui est encore plus intrigant que le fait historique de la CEE inscrite dans un projet (néo)colonial, c’est que ce fait ait été si commodément oublié dans l’historiographie européenne. Césaire dénonçait déjà la sélectivité et l’hypocrisie des dirigeants européens qui prônent la démocratie et les droits humains. L’indignation suscitée par l’Holocauste et le nazisme a été grande parce qu’ils ont eu lieu en Europe. Mais lorsqu’il s’agit de la violence coloniale actuelle en dehors des frontières européennes, les Européens souffrent apparemment d’une « forme d’amnésie collective », explique-t-il25. Cette amnésie historique deviendra un élément central de l’idéologie de l’UE : d’une part, l’accent mis sur l’Holocauste et la Seconde Guerre mondiale, qui est censé légitimer la poursuite de l’intégration européenne ; d’autre part, le silence sur l’histoire coloniale, et en particulier la complicité de la CEE26. Des recherches archivistiques récentes modifient ce récit, mais les penseurs postcoloniaux et panafricains le savaient déjà depuis longtemps.

L’Europe géopolitique et la résistance des pays du Sud global

Les progressistes savent depuis longtemps que l’UE n’est pas une jolie histoire romantique. Cependant, les profondes implications coloniales du projet européen sont encore largement méconnues. Une meilleure compréhension de ce phénomène permet de comprendre les lacunes actuelles de la politique de l’UE. Il ne s’agit pas de regrettables accidents de parcours : nous voyons ici les manifestations concrètes d’un projet colonial-capitaliste qui montre brièvement sa vraie nature en temps de crise. Malgré tous les changements en cours, il existe une continuité historique tangible.

Par exemple, l’UE veut aujourd’hui devenir un projet « géopolitique ». Les dirigeants européens parlent du « réveil géopolitique » de l’UE, de la fin de la « naïveté » européenne et du début d’un projet plus « réaliste » pour l’UE. Les universitaires travaillent actuellement d’arrache-pied pour décrire, conceptualiser et légitimer ce « tournant géopolitique ». Ce que l’on oublie souvent, c’est que l’UE a toujours été un projet géopolitique. La politique (néo)coloniale du « diviser pour mieux régner » à l’égard du Sud global a pris diverses formes au cours des dernières décennies, mais l’Europe n’a jamais été une belle au bois dormant. La pensée « eurafricaine » des architectes de la CEE dans les années 1950 est restée intacte pour l’essentiel.

Le discours, désormais tristement célèbre de Josep Borrell, haut représentant de l’UE pour la politique étrangère et vice-président de la Commission européenne (jusqu’en novembre 2024), selon lequel le monde est une « jungle » et l’UE un « jardin », n’est que l’exemple le plus récent et le plus explicite de la manière dont la pensée de supériorité européenne devrait légitimer la poursuite des interventions dans le reste du monde.

Mais, comme dans les années 1950-1960, nous assistons aujourd’hui à une résistance du Sud global à la domination (et à l’arrogance) de l’Europe. Lorsqu’Ursula von der Leyen a effectué sa première visite à l’étranger en tant que présidente de la Commission, à l’Union africaine à Addis-Abeba en février 2020, la réponse a été que l’Afrique pouvait résoudre ses propres problèmes et qu’une conférence européenne n’était pas nécessaire. Malgré d’intenses pressions, de nombreuses anciennes colonies refusent de conclure des APE ou traînent les pieds pour les ratifier et les mettre en œuvre. La cérémonie de clôture de l’Accord de Samoa, en novembre 2023, a tourné à l’humiliation diplomatique pour l’UE, puisque 35 pays sur 79 ont refusé de signer l’accord. Un an auparavant, l’Afrique du Sud avait déjà décidé de quitter le groupe.

Le challenger principal est sans aucun doute les BRICS. À la fin des années 2000, les BRICS étaient composés du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud. En janvier 2024, le groupe s’est élargi pour inclure l’Égypte, l’Éthiopie, l’Iran et les Émirats arabes unis. Les analystes occidentaux aiment à souligner les intérêts opposés et les incohérences au sein du groupe, mais ils sous-estiment la façon dont le forum des BRICS s’inscrit dans une longue tradition de construction de blocs anti-occidentaux et anticoloniaux. Les BRICS peuvent compter sur une grande sympathie dans les pays du Sud global, parce qu’ils marchent sur les pieds des puissants de ce monde27. La Chine et la Russie, en particulier, exercent une influence croissante en Afrique. Et au grand dam de nombreux responsables politiques européens, leurs anciennes colonies ne les ont pas suivis lors des votes aux Nations unies sur la guerre de la Russie en Ukraine.

C’est l’histoire de la violence structurelle. Pas un projet de paix, pas de colonialisme à l’ancienne, mais l’enracinement du racisme et de l’exploitation sous couvert de « coopération internationale »

Cyniquement, cependant, il apparaît que certains de ces challengers poursuivent à leur manière les programmes colonialo-capitalistes. Nous ne pouvons donc pas être naïfs face à cette évolution. Bien qu’il n’y ait aucune garantie que la nouvelle multipolarité conduise à un monde meilleur, on peut espérer que les rapports de force existants seront remis en question. Dans l’esprit de la conférence afro-asiatique de Bandung de 1955 et des plaidoyers du G77 pour un nouvel ordre économique international dans les années 1960-70, nous constatons que les pays de l’(ancienne) périphérie n’ont pas l’intention de s’accommoder de l’ordre actuel28. Dans le meilleur des cas, cela peut conduire à des idées plus créatives sur un monde réellement solidaire et plurivers.

Au lieu de montrer ses muscles, l’UE pourrait également être appelée à faire preuve de plus de modestie face au défi du Sud global. Au lieu de construire encore plus de projets financiers, diplomatiques et même militaires pour poursuivre le projet de civilisation, nous pourrions envisager une position radicalement différente dans le nouvel ordre mondial. Une première étape peut être de reconnaître les racines coloniales du projet européen et leur impact durable. Les réparations financières peuvent être utiles si elles s’inscrivent dans le cadre d’une réforme plus large de l’ordre économique mondial. Il ne s’agit donc pas de générosité et de supériorité, mais de réparation et de justice, et inévitablement d’une redistribution des pouvoirs29. Les réformes écomodernistes ne résoudront rien si elles poursuivent le projet capitaliste-colonial. L’annulation de la dette et des actions efficaces contre la fraude financière des entreprises européennes sont des outils accessibles pour démontrer la bonne volonté de l’Europe. La suspension des APE constituerait déjà un signal important. En outre, les États membres européens pourraient transférer le poids de leur vote à la Banque mondiale aux « bénéficiaires » des budgets de développement, à savoir les pays du Sud global. Plus près de nous, la mise en œuvre d’une véritable politique antiraciste et d’immigration humaine serait également une bonne chose.

De nombreux activistes, mouvements sociaux, politiques, ONG, universitaires et penseurs critiques s’y attellent déjà depuis un certain temps. Ils n’ont pas non plus besoin de partir de zéro, car de nombreux précédents existent. Il est à espérer que leur influence continuera à s’accroître à mesure que la domination européenne sera véritablement remise en question et que les masques colonialo-capitalistes tomberont enfin.

Footnotes

  1. Nous utilisons ici le terme « européen » pour désigner la relation complexe entre l’UE, anciennement la Communauté économique européenne (CEE), les États membres nationaux et les autres acteurs européens.
  2. Sebhatu, R. W. (2020). Applying postcolonial approaches to studies of Africa-EU relations. In The Routledge handbook of EU-Africa relations (p. 38-50). Routledge. Onar, N. F., & Nicolaïdis, K. (2013). The Decentring Agenda : Europe as a post-colonial power. Cooperation and conflict, 48(2), 283-303.
  3. Peo Hansen et Steffan Jonsson effectuent dans cet ouvrage un travail pionnier. Ils n’abordent pas uniquement les agendas coloniaux derrière la CEE, mais aussi derrière d’autres projets d’intégration européens d’après-guerre tels que le Conseil de l’Europe (1949), la Communauté européenne du charbon et de l’acier (1951), la Communauté européenne de défense (1952) et Euratom (1957). Hansen, P., et Jonsson, S. (2014). Eurafrica : The untold history of European integration and colonialism (p. 304). Bloomsbury Academic. Voir aussi : van de Grift, L., de Bruin, R., van Meurs, W., & Hoetink, C. (2024). The unfinished history of European integration. Amsterdam University Press.
  4. Bhambra, G. K. (2022). A decolonial project for Europe. JCMS : Journal of Common Market Studies, 60(2), 229-244
  5. Getachew, A. (2019). Worldmaking after empire : The rise and fall of self-determination. Princeton University Press.
  6. Schreurs, R. (1993). L’Eurafrique dans les négociations du Traité de Rome, 1956-1957. Politique Africaine, 49(1), 82-92.
  7. Hansen, P., et Jonsson, S. (2014). Eurafrica : The untold history of European integration and colonialism (p. 304). Bloomsbury Academic.
  8. Cette citation illustre clairement son propos : « La mission de l’Europe en Afrique est d’apporter la lumière sur le continent le plus sombre. Tant que la race noire n’est pas capable de développer et de civiliser sa partie de la terre, c’est la race blanche qui doit le faire.»
  9. Polonska-Kimunguyi, E. (2023). The Myth of Peace and Statehood in European Integration Theory : The Imperial Legal Order of the Rome Treaty. European Foreign Affairs Review, 28(2).
  10. De Weert, M. (2023). Belgium’s Colonial Interests in the Treaty of Rome Negotiations. Thèse non publiée.
  11. Hansen, P., et Jonsson, S. (2013). A Statue to Nasser? : Eurafrica, the Colonial Roots of European Integration, and the 2012 Nobel Peace Prize. Mediterranean Quarterly, 24(4), 5-18.
  12. https://mjp.univ-perp.fr/europe/1957romea4.htm
  13. Brown, M. (2022). The Seventh Member State : Algeria, France, and the European Community Harvard University Press.
  14. Eklund, H. (2023). Peoples, inhabitants and workers : Colonialism in the Treaty of Rome. European Journal of International Law, 34(4), 831-854.
  15. Nkrumah, K. (1965). Neo-colonialism : The last stage of imperialism. 1965. Nkrumah, K. (1963). Africa must unite. Londres : Heinemann.
  16. Dimier, V. (2014). The invention of a European development aid bureaucracy : Recycling empire. Springer.
  17. L’élargissement au Royaume-Uni a encore augmenté le nombre de territoires d’outre-mer (par exemple les îles Malouines, d’autres îles des Caraïbes et de l’océan Indien, l’Antarctique britannique) et d’anciennes colonies (plusieurs pays africains) dans le réseau de l’UE. Depuis l’adhésion du Danemark, le Groenland est également un territoire d’outre-mer de l’UE.
  18. Voir par exemple Langan, M. (2020). Neo-colonialism, Nkrumah and Africa-Europe ties. Dans Routledge handbook of pan-Africanism (p. 101-111). Routledge ; Odijie, M. E. (2022). Unintentional neo-colonialism ? Three generations of trade and development relationship between EU and West Africa. Journal of European Integration, 44(3), 347-363. Alcazar III, A. S. M., Nessel, C., & Orbie, J. (2023). Decolonising EU Trade Relations with the Global Souths?. Journal of Contemporary European Research, 19(2). Sebhatu, R. W. (2020). Applying postcolonial approaches to studies of Africa-EU relations. Dans The Routledge handbook of EU-Africa relations (p. 38-50). Routledge. Kamga, S. G. (2014). « Economic Partnerships Agreements : Another Tool for the Scramble for Africa or a Viable Undertaking for the Continent’s Development. » In M. Muchie, V. Gumede, P. Lukhele-Olorunju et H. T. Demissie (eds.), Unite or Perish : Africa Fifty Years after the Founding of the OAU. Pretoria : Africa Institute of South Africa, p. 247-262 ; Tandon, Y. (2015). Trade is war : the West’s war against the world. Or Books. Lopes, C. (2024). The Self-Deception Trap : Exploring the Economic Dimensions of Charity Dependency within Africa-Europe Relations. Springer Nature.
  19. Bougrea, A. (2024). The European Investment Bank in Sub-Saharan Africa : constrained expansion. Journal of Economic Policy Reform, 1-25.
  20. Pasture, P. (2018). The EC/EU between the Art of Forgetting and the Palimpsest of Empire. European Review, 26(3), 545-581.
  21. Césaire, A. (1950/1955). Discourse on Colonialism.
  22. Fanon, F. (1961). The Wretched of the Earth. New York : Grove Press.
  23. Rodney W (1972a) How Europe Underdeveloped Africa (première édition), Bogle-L’Ouveture Publications, Londres, et Tanzania Publishing House, Dar es Salaam.
  24. Galtung, Johan (1973) The European Community : A Superpower in the Making. Oslo/Londres : Norwegian University Press/Allen & Unwin.
  25. Césaire, A. (1950/1955). Discourse on Colonialism.
  26. Ejdus, F. (2022). Anxiety, Dissonance and Imperial Amnesia of the European Union. Uluslararası İlişkiler Dergisi, 19(73), 49-64.
  27. Mertens, P. (2023). Mutinerie, comment le monde bascule, Éditions Agone, Marseille, 2024.
  28. Ndlovu-Gatsheni, S. J. (2020). Decolonization, development and knowledge in Africa : Turning over a new leaf. Routledge.
  29. Rutazibwa, O. U. (2018). On babies and bathwater : Decolonizing international development studies 1. Dans Decolonisation and feminisms in global teaching and learning (p. 158-180). Routledge.