Depuis plusieurs mois, la série « Serviteur du peuple » est disponible sur Netflix. Ce feuilleton a rendu populaire l’acteur Volodymyr Zelensky qui deviendra ensuite président de l’Ukraine.
Serviteur du peuple est en premier lieu le titre d’une série télévisée ukrainienne, dans laquelle a figuré l’actuel président Volodymyr Zelensky. Serviteur du peuple est également le nom du parti politique fondé par le même Zelensky. Élu à la magistrature suprême en 2019, la série a été un véritable marchepied pour sa victoire électorale. Elle dépeint le personnage de Vassili Goloborodko, un anti-héros fantasque élu président, qui place le combat contre la corruption au cœur de son mandat. Dans sa stratégie de communication bien rodée, le président ukrainien a su jouer de cette mise en abîme. Le mythe de « l’acteur devenu président » a permis d’imposer en Europe un récit hagiographique du parcours de Volodymyr Zelensky. L’accession au pouvoir de ce dernier n’a pourtant rien du conte de fée auquel on assiste dans la série…
Vassili Goloborodko contre la corruption
Le personnage de fiction qu’incarne Zelensky est un homme normal si ce n’est banal : Vassili Goloborodko. C’est un professeur ( d’histoire ) avoisinant la quarantaine, père de famille divorcé qui retourne chez ses parents le temps de rebondir. Un destin que peu envient, pourtant si commun. Vassili retourne dans sa maison familiale de Kiev ; une fade errance se profile. Son indépendance rappelle l’adulte qu’est Tanguy, un mélange de vieux garçon et d’éternel adolescent de 37 ans. Ce personnage passif n’excelle pas non plus dans son métier. Tout du moins aux yeux de sa supérieure. C’est un professeur hors des cadres imposés, un idéaliste qui n’a pas sa langue dans sa poche. On pourrait le qualifier de marginal. Pourtant, il sait mettre des mots sur un phénomène tabou en Ukraine : la corruption.
Lors des élections présidentielles de 2019, Zelensky a pris appui sur cette série pour véritablement s’envoler dans les sondages, puis les suffrages.
Celle-ci constitue un des thèmes centraux de la série. La corruption est un problème majeur du pays. Véritable frein pour son économie, la gestion des richesses ukrainiennes par une poignée d’oligarques a plongé la majorité de la population dans une grande pauvreté. Rappelons qu’en Ukraine, le revenu mensuel moyen est de 281 $ ( source : Banque Mondiale, 2019 ). Les Ukrainiens voient les aides sociales diminuer au fur et à mesure que la corruption s’installe. Face à cette situation, de nombreux habitants quittent le pays pour travailler à l’étranger. C’est donc contre ces inégalités que Goloborodko proteste. La salle de classe du professeur Goloborodko est un lieu de libre parole, d’humanisme et d’espoir. Ce professeur en action marque le tournant de la série.
Président malgré lui
Le rêveur a ses admirateurs, ses paroles sont bues par ses élèves. Une caméra dissimulée, la séquence partagée sur les réseaux sociaux : le voici au cœur des polémiques. Pourquoi ne pas se lancer dans la quête du pouvoir pour donner vie à ses idéaux souvent refoulés ? C’est le choix que prend le professeur Goloborodko. Tout s’enchaîne à la vitesse du buzz, les levées de fonds sont instantanées, sa notoriété devient en quelques jours évidente : tout le pousse à être président. Du jour au lendemain, le destin de cette personne lambda est renversé par les évidences illusoires que nous offre Internet. Vassili est élu en un claquement de doigts et arrive au pouvoir avec des idées sorties de leur sommeil.